L’aire paillée intégrale n’a pas d’équivalent pour le confort des vaches et la production de fumier à composter : c’est pourquoi le Gaec du Luthau, à Val-de-Virieu en Isère, a fait ce choix. Revers de la médaille : cet élevage de 75 vaches laitières, pour une référence de 700 000 l, s’est battu pendant des années contre les mammites. « Les vaches se recontaminaient entre elles, nous pouvions avoir vingt mammites dans l’hiver, se souvient Valentin Poulet, l’un des trois associés. Nous faisions notre possible : réformer les vaches à problème, curer chaque semaine, désinfecter systématiquement les trayons… Cela ne suffisait pas. » La situation s’est assainie quand la vaccination s’est ajoutée à ces mesures d’hygiène.
Dans la patientèle du Dr Olivier Ribon, au cabinet Vet’Nord Isère, une dizaine d’élevages a adopté la vaccination. « C’est une arme intéressante à condition d’avoir déjà agi pour maîtriser les contaminations, approuve le vétérinaire. La priorité est d’agir sur tous les facteurs de risque : l’hygiène de traite, l’ambiance du bâtiment, le réglage de la machine à traire… Ensuite, comme différents germes peuvent causer des mammites, il faut savoir lesquels sont présents sur l’exploitation avant d’envisager de vacciner. L’analyse PCR réalisée sur des échantillons de lait coûte une trentaine d’euros par germe ; on en recherche souvent quatre ou cinq. » Cela permettra de déterminer le protocole de traitement, sachant qu’il existe deux vaccins sur le marché, formulés par le laboratoire Hipra : Startvac (contre les coliformes et staphylocoques dorés notamment) et Ubac (contre Streptococcus uberis). Souvent, leur utilisation couplée est décidée.
Protocole très exigeant
Quand la décision est prise, le troupeau entier doit être vacciné et une grande rigueur s’impose. « En général, on fait d’abord deux injections à trois ou quatre semaines d’intervalle, puis un rappel tous les ans, tous les six mois, voire tous les trois mois, indique le Dr Ribon. Des outils Excel aident à ne pas oublier les rappels, mais le protocole est contraignant. » Les associés du Gaec du Luthau ne le contrediront pas. « Nous utilisons les deux vaccins, avec des rappels tous les six mois pour Ubac et tous les trois mois pour Startvac, indique Valentin Poulet. L’été, cela nous oblige à courir après les vaches au pré, même après les génisses et les taries… » Car les génisses s’intègrent dans ce schéma au fur et à mesure, après voir reçu leurs deux primo-injections.
Un bilan annuel est fait par une technicienne du laboratoire dans les élevages. Parfois, les résultats ne sont pas concluants. « Certains éleveurs ont testé puis abandonné la vaccination, observe le Dr Ribon. C’est généralement parce qu’ils pensaient à tort avoir maîtrisé tous les facteurs de risque : or si ce n’est pas le cas, le vaccin ne fait pas de miracle. »
Au Gaec du Luthau, le retour sur investissement est net. « La vaccination nous coûte presque 5 000 € par an, mais nous perdions le double entre le lait jeté et la perte des primes qualité, évalue Valentin Poulet. Et nous devions parfois réformer des supervaches à cause des cellules. Maintenant, les vaches sont en meilleure forme, nous sommes beaucoup moins stressés et nous pouvons baser notre sélection sur d’autres critères que les cellules ! »