Au milieu des champs de blé, drag-queens, militants, agriculteurs, parents et enfants défilaient ensemble sur des tracteurs multicolores ce samedi 29 juillet 2023. Il s’agissait de la deuxième édition des Fiertés rurales, sur la commune de Chenevelles, dans la Vienne. Habituellement organisée dans les milieux urbains, cette marche des fiertés a pour but de redorer l’image des campagnes, d’apporter de la visibilité à la communauté LGBTQI + et de briser l’isolement des personnes concernées. Cet événement qui réunissaient près de 2 000 personnes n’aurait pas pu se dérouler sans l’aide précieuse des agriculteurs grâce au prêt de tracteurs et de terrains.

Un char décoré à l'occasion du défilé sur le thème de la ruralite. ( ©  Cyril Cibert)

Les agriculteurs à l’honneur

Concours du plus beau tracteur, installation des scènes, fauche des champs : « Tout s’est fait grâce aux agriculteurs, c’est un véritable partenariat », atteste Cyril Cibert, le maire de la commune. Pour l’occasion, Christophe Granger, céréalier basé à Chenevelles, a mis à disposition 10 hectares de ses terres pour accueillir la marche et permettre les festivités. Il avait déjà participé l’année dernière avec la mise à disposition d’un tracteur pour en faire un char de défilé.

« On était une dizaine d’agriculteurs et c’était une première pour nous, se souvient-il. Cette année, les jeunes agriculteurs (JA) se sont rajoutés. Il y avait huit chars au total, fournis et conduits par des exploitants agricoles. » Le céréalier sent que le mouvement ne va pas s’arrêter là. « On est passé de 500 personnes à 2 000. Je pense que d’autres agriculteurs vont nous rejoindre maintenant que l’appréhension de l’inconnu est derrière nous. »

Des représentants du syndicat Jeunes Agriculteurs (JA) conduisaient deux chars pour l'édition de 2023. ( ©  Terrence Katchadourian)

Selon lui, les mentalités dans le monde agricole évoluent. « À l’époque, les agriculteurs ne sortaient pas de chez eux, poursuit Christophe Granger. Aujourd’hui, on part en vacances, on n'a plus le même mode de vie. Il ne faut pas oublier que certains d’entre nous sont gays. »

Des régions laissées de côté

« J’en ai assez d’entendre dire que les gens de la campagne sont des ploucs, racistes et homophobes, insiste Cyril Cibert. Les jeunes agriculteurs sont hyperconnectés maintenant. Il y a parfois plus de bienveillance dans les zones rurales que dans les villes. »

Pour l’association Stop Homophobie, fondatrice de l’événement, l’initiative est l’occasion de briser l’isolement des personnes de la communauté dans les zones rurales. « On a compris que de nombreuses personnes se sentent à l’écart dans les coins reculés. Il n’y a pas forcément de marche, ni de lieu de rencontres ou d’échange. On a vu une opportunité de développer la visibilité de la cause et les prides de campagnes », témoigne Terrence Katchadourian, cofondateur et secrétaire général de l’association Stop Homophobie.

Des politiques sur place

Au milieu de tout ce monde, deux ministres étaient présentes : Bérangère Couillard, ministre déléguée en charge de l’Égalité femmes hommes et de la Lutte contre la haine et les discriminations, et Dominique Faure, ministre déléguée à la Ruralité.

Au passage, Bérangère Couillard annonçait que « l’État allait consacrer dix millions d’euros sur quatre ans pour lutter contre les discriminations à l'égard des LGBT partout sur le territoire, dont trois millions dès cette année pour la création de dix nouveaux centres », selon l’Agence France-Presse (AFP).