Dans notre vieille Europe, assurer le renouvellement des générations d’agriculteurs dans les cinq à dix ans à venir constitue un véritable défi (lire notre dossier page 40). En effet, près de 60 % des fermes de l’UE sont gérées par des paysans de plus de 55 ans. Du Portugal à la Roumanie et de la Suède à l’Italie, tous les pays sont concernés.

La France n’échappe d’ailleurs pas à la règle : plus de 120 000 chefs d’exploitation sont susceptibles de prendre leur retraite dans les cinq ans qui viennent. Or, dans l’Hexagone, on ne compte aujourd’hui qu’une installation pour presque deux départs. Et près de la moitié des cessions se font hors cadre familial, de plus en plus avec des jeunes non issus du milieu agricole.

Si transmettre à un enfant n’est pas toujours simple et doit être préparé avec minutie, céder à une personne hors du cercle familial doit être encore davantage anticipé. Car il faut être en mesure d’intéresser des repreneurs. Et pour cela, annoncer sa volonté d’arrêter son activité doit se faire suffisamment tôt en utilisant tous les canaux possibles. Des experts de terrain ne cachent cependant pas que dans certaines zones, ce sont les repreneurs, moins nombreux que les cédants, qui auront le pouvoir de choisir. Et à ce moment-là, tous les critères entrent en jeux : qualité de l’outil, investissements à réaliser, niveau de productivité des animaux, parcellaire et potentiel des terres, localisation de l’exploitation… Mais l’élément le plus déterminant reste évidemment le montant de la reprise. Car si le cédant veut assurer avec la cession son niveau de vie au cours de ses années de retraite, le jeune doit aussi pouvoir vivre de son activité future et rembourser ses emprunts. Il faut donc trouver un juste prix.

Finie l’époque où on se disait qu’en cas de reprise élevée, l’on se « referait » au moment de quitter le métier. D’autant que les fluctuations de marchés et les évolutions de la politique agricole sont difficiles à anticiper. En trente ans, le capital à engager sur une exploitation a d’ailleurs augmenté de 40 % sans que les revenus suivent.

Bien transmettre, c’est aussi savoir s’entourer de conseillers et d’experts dans différents domaines (gestion, fiscalité, juridique, patrimoine…) parce que les montages peuvent être complexes avec souvent plusieurs options à envisager (1). Sans oublier les aspects personnels, familiaux et humains. Car on ne tourne pas facilement la page sur ce que l’on a construit et amélioré pendant plus de quarante ans de carrière. Et a fortiori quand on cède aussi la maison d’habitation où se sont forgés les souvenirs de toute une famille !

(1) La France agricole publiera mi-février un numéro hors-série de 92 pages, Transmission et patrimoine : tous les conseils pour passer la main. Il pourra être acheté sur notre site internet lafranceagricole.fr ou
par correspondance­.