Qui ne s’est jamais questionné sur la qualité de l’eau de son robinet ? En réponse à cette préoccupation montante des citoyens, plusieurs associations montent au créneau, jugeant que cette ressource doit être mieux protégée des pollutions. Ce 18 novembre 2025, c’est l’UFC-Que Choisir qui a lancé sa campagne, revendiquant le « ras-le-bol » des consommateurs à payer seuls « le traitement des pollutions qu’ils subissent ».

L’association met en avant un recul de dix points du niveau de conformité de l’eau potable par rapport à la précédente étude de 2021. « En 2025, seulement 85 % des réseaux de distribution d’eau potable sont conformes à l’ensemble des critères réglementaires », affirme-t-elle (1). Générations futures et Data for good, qui ont lancé récemment une carte interactive « Dans mon eau », relèvent des chiffres similaires de 87 % d’unités de distribution d’eau potable en conformité avec la réglementation.

Les phytos à l’origine du plus grand nombre de dépassements

Les principales causes de dépassement des normes, mis en avant par l’UFC-Que Choisir, sont liées aux métabolites de produits phyto, comme lors de sa précédente enquête. Mais la dégradation des résultats de non-conformité en 2025 ne découle pas de concentrations en hausse ou d’une évolution des pratiques agricoles, mais de « la recherche de nouveaux résidus de pesticides introduite par les ARS à partir de 2023 », détaille l’association de consommateurs.

Parmi ces nouveaux critères recherchés, deux métabolites de chloridazone sont à l’origine du plus grand nombre de dépassements. Le chloridazone est pourtant interdit d’utilisation en France, tout comme le chlorotalonil, l’atrazine et l’alachlor dont on retrouve des métabolites parmi les sept premiers à causer le plus de dépassements de normes pour l’eau potable.

Bien que les dépassements de normes ne soient pas en lien avec les pratiques agricoles actuelles, l’association de consommateurs met d’abord en avant dans son rapport le fait que « l’agriculture industrielle n’a aucunement changé ses pratiques et continue à polluer massivement les nappes phréatiques et les fleuves ».

Les zones de dépassements des normes concernant les molécules phytosanitaires sont essentiellement localisées dans le nord de la France. Elles « correspondent aux zones de cultures intensives du nord de la France », juge l’UFC-Que Choisir. « Des grandes villes sont désormais touchées », ajoute-t-elle, tout en précisant que dans la très grande majorité des cas, « l’eau peut continuer à être bue ». Les normes françaises et européennes pour la production d’eau potable sont en effet fixées à des niveaux très bas, et bien en deçà des valeurs susceptibles d’avoir un impact sur la santé.

« Augmentation inévitable des coûts de dépollution »

« Les effets de ces contaminations commencent déjà à se répercuter sur le prix de l’eau », estime l’UFC-Que Choisir, qui s’appuie sur une source de l’Insee montrant une augmentation du prix de l’eau potable de 16 % depuis deux ans. De plus, l’association prédit « une augmentation inévitable des coûts de dépollution dans les prochaines années ».

Pourquoi ? Parce que les techniques classiques de filtration par charbon actif seront insuffisantes pour les nouveaux métabolites analysés. Et en particulier pour les polluants dits « éternels » qui seront systématiquement recherchés à partir de janvier 2026, et pour lesquels il faudra se tourner vers de nouveaux traitements membranaires plus coûteux, voire « financièrement inaccessibles pour les petites collectivités, affirme l’UFC-Que Choisir. Il importe donc de trouver des solutions à la fois pour prévenir la contamination des eaux brutes et limiter la charge financière pour les consommateurs. »

53 % des dépenses supportées par les ménages

Selon un rapport en partie financé par le ministère de la Transition écologique, les dépenses totales pour la protection de l’eau s’élèvent à 23,4 milliards d’euros par an (en moyenne sur la période de 2013 à 2022). Mais il faudrait allouer 13 milliards d’euros supplémentaires, notamment pour tenir compte des coûts non couverts aujourd’hui, estime le Cercle de l’eau, qui avait présenté ce document lors du salon des maires en 2024.

Sur ce budget supplémentaire de 13 milliards d’euros, 5 milliards d’euros seraient à « consacrer à la dépollution et à la restauration des masses d’eau pour atteindre leur bon état au sens de la directive-cadre sur l’eau », avancent les rapporteurs. Les dépenses actuelles sont aujourd’hui supportées à 53 % par les ménages, contre 9 % pour l’agriculture et 23 % pour les industriels, indique aussi ce rapport.

Demande de protection des captages

L’association de consommateurs demande la mise en place de plusieurs mesures afin « de limiter les coûts de dépollution et de limiter la charge financière pour les consommateurs » :

  • « Un renforcement des procédures d’autorisation » des produits phytosanitaires, notamment en permettant à l’Anses de « commanditer des études toxicologiques indépendantes » ;
  • Une protection efficace des captages, notamment grâce à la délimitation des aires de protection et la mise en œuvre de mesures obligatoires sur ces aires ;
  • Un relèvement de la redevance pour pollution diffuse destiné à aider les petites communes.

L’augmentation de la redevance pour pollution diffuse revient régulièrement dans les débats. Après que cette mesure a été abandonnée en 2023 à la suite de nombreuses mobilisations agricoles, des députés l’ont à nouveau évoquée il y a quelques jours pour améliorer la qualité des cours d’eau.

Quant aux captages, un nouvel arrêté définissant « les points de prélèvement sensibles » devrait bientôt être mis en consultation.

(1) Au total 50 paramètres définis par la réglementation.