Malgré l’abandon en 2023 du relèvement des redevances pour pollution diffuse prélevées sur les achats de produits phytosanitaires, des députés reviennent à la charge. Julie Ozenne, députée écologiste et sociale, et Freddy Sertin, député d'Ensemble pour la République, ont présenté dans un rapport le 12 novembre plusieurs recommandations pour améliorer l’état des cours d’eau.
« Pollueur-payeur »
Ils ont en ligne de mire « la pollution diffuse d’origine agricole (nitrates, pesticides) » qu’ils considèrent « aujourd’hui (comme) l’une des principales causes de dégradation de la ressource » en eau. La même agriculture qui contribue à hauteur de 9 % des redevances dues aux agences de l’eau alors qu’elle consomme 58 % de l’eau prélevée selon le décompte du rapport. Sur la base de leurs observations, les deux rapporteurs jugent « indispensable de repenser et de renforcer les politiques consacrées à la protection et à la restauration » des cours d’eau.
Renforcer rime avec davantage de budget. Les élus estiment à « environ 500 millions d’euros par an » les fonds nécessaires pour restaurer les cours d’eau. S’appuyant sur le principe pollueur/payeur et cherchant à éviter que la charge repose « sur le consommateur et le pouvoir d’achat des Français », les députés plaident pour une réforme du financement des agences de l’eau. Lors de la présentation du rapport à l’Assemblée le 12 novembre, Julie Ozenne a proposé « de rééquilibrer les redevances (NDLR finançant les agences de l’eau) pour diminuer la part due par les usagers domestiques et rehausser la part due pour pollutions diffuses et aux prélèvements ». La hausse de la redevance pour pollution diffuse est même qualifiée d'« urgent » par les rapporteurs.
Pérenniser les paiements pour services environnementaux
Au-delà de faire payer davantage le secteur agricole, les députés souhaitent que la Pac vienne soutenir davantage les agriculteurs dans l’adoption de pratiques favorisant la préservation de la ressource en eau. Ils réclament à ce titre un relèvement des aides en faveur des MAEC et de l’agriculture biologique.
Ils défendent également l’idée que les agriculteurs soient récompensés pour leurs pratiques favorisant la préservation de la ressource en eau. C’est l’objectif des paiements pour services environnementaux (PSE) financés par les agences de l’eau et expérimenté depuis 2020. Un dispositif avec une « réelle dynamique », selon le rapport. 113 projets ont été engagés financièrement par les agences de l’eau avant la fin de 2022, mobilisant 3 041 exploitations agricoles. Samuel Groussard, éleveur en Bretagne que nous avons rencontré en mars dernier en fait partie. Il avait le droit à un paiement de 146 € par hectare.
« Le dispositif est globalement jugé attractif, permettant de mobiliser de nouveaux profils d’agriculteurs par rapport aux dispositifs agroenvironnementaux existants : 86 % des agriculteurs engagés déclarent vouloir faire évoluer leurs pratiques, et 84 % estiment le PSE juste et équitable au regard des efforts fournis », souligne le rapport. Même si Chambres d’agriculture France a relevé durant les auditions menées par les députés que les PSE souffraient d’une « gestionnaire administrative chronophage » pour « créer de réelles dynamiques de territoires », les rapporteurs souhaitent que les PSE soient pérennisés. Officiellement, l’expérimentation doit s’arrêter en 2027.