Dans un contexte de sécheresses répétées, les ressources fourragères de la ferme de Tarbes, à Villelongue-d’Aude (Aude), sont devenues de plus en plus fluctuantes tant en quantité qu’en qualité. « L’été, les prairies sont grillées, mais les bois nous sauvent, reconnaît Yann Marnezy, éleveur de brebis depuis 2014 aux côtés de Justine Berthier. Nous avons voulu aller plus loin, en remettant l’arbre au centre de notre système fourrager. Car nous sommes convaincus que plus il y aura d’arbres, plus la ferme sera résiliente. »

Alors, pour renforcer l’autonomie fourragère de leur exploitation, notamment lorsque leurs prairies deviennent improductives, et protéger ces dernières ainsi que les animaux du soleil et du vent, Yann et Justine se sont lancés en 2021 dans l’implantation de haies fourragères sur une parcelle de 6 000 m², proche du corps de ferme. Près de 600 arbres ont été plantés, de quinze espèces différentes (mûrier blanc, frêne, saules, aulnes, coronille, troène, érable, cornouiller, cerisier, noisetier, églantier…).

Entretien des haies

Un travail du sol a été réalisé en profondeur avec une sous-soleuse, puis un affinage en surface pour faciliter l’implantation à la fin de l’été. Les espèces plantées, de tailles diverses, ont été choisies en fonction de leur valeur fourragère et de leur adaptation aux conditions locales. « Hormis le mûrier blanc, la plupart des espèces se trouvent naturellement dans l’écosystème », souligne Justine.

La plantation s’est faite tôt en hiver (décembre), une fois le sol ressuyé, afin d’optimiser l’enracinement et limiter le stress hydrique. Enfin, les haies ont été plantées avec un espacement de 15 mètres de largeur et des tournières de 10 mètres, pour faciliter le passage des machines et limiter le stress hydrique.

Accès à l’eau

L’irrigation et le paillage ont été les étapes suivantes. L’accès à l’eau a été géré par un système de tuyaux arrivant à la parcelle. La première année, les éleveurs ont procédé à trois arrosages (15 juillet, 15 août et 15 septembre 2022) à raison de 20 litres par arbre, puis deux arrosages en 2023. « L’arrosage est conséquent, mais il n’est pas fréquent, dit Yann. En procédant de la sorte, l’eau va en profondeur et permet aux arbres de développer leur système racinaire. » Pour que le sol garde bien l’humidité et que la concurrence de l’herbe soit limitée, un paillage a été réalisé avec 20 cm de broyats sur un mètre de chaque côté du plant. Il est renouvelé chaque année.

Quant à la taille, celle des buissons s’est faite à ras les premières années avant le mois de mars. Toutes les haies ont été protégées avec des parcs mobiles en filets pour garantir leur croissance et éviter que les animaux ne s’en approchent lorsqu’ils pâturent dans la parcelle.

S’il est encore trop tôt pour pouvoir mesurer les avantages apportés par ces plantations, ces dernières ont induit d’ores et déjà une évolution dans les pratiques de pâturage des éleveurs. « Nous avons augmenté le nombre de pâturages tournants, et faisons pâturer une trentaine de brebis par jour dans une travée, détaille Justine. Comme nous en avons sept, cela dure une semaine. La parcelle est laissée au repos deux semaines, puis les animaux y reviennent ensuite. Dans tous les cas, il est important de bien choisir son lot de brebis. Ce qui est très positif déjà, c’est que la parcelle est beaucoup moins surexploitée ».