L’enjeu est connu par de nombreux éleveurs : gagner ou conserver des surfaces fourragères pour développer son autonomie face au changement climatique et pour répondre à l’agrandissement des troupeaux. Il faut donc parfois faire pâturer son cheptel dans des parcours éloignés. Reste alors la question de la protection des animaux face aux fortes chaleurs et aux prédateurs.
Ce sont les raisons pour lesquelles le parc naturel régional (PNR) des Grands Causses, dans l’Aveyron (Occitanie) a lancé une expérimentation pour la construction d’abris de troupeaux sur ces parcours isolés. Depuis le démarrage de la réflexion il y a dix ans, les contraintes se sont multipliées : « On est sur des zones naturelles, donc les services de l’État ont accepté un bâtiment de 300 m² au maximum, démontable et pas raccordé au réseau », indique Fabien Daunas, chargé de mission au PNR.
« Aussi cher qu’une bergerie »
Le premier — et aujourd’hui le seul — de ces abris a été créé chez Jérémi et Adeline Jaoul, à Nant. L’éleveur témoigne : « L’architecte avait imaginé une charpente simple, mais les bureaux d’études sont passés par là. » L’abri a finalement coûté 68 000 €, dont 30 000 € subventionnés par la Région. « Et encore, avec mon père, nous avons fait beaucoup de travail », assure Jérémi Jaoul. « On n’a pas pu faire de miracle, tranche Fabien Daunas. On est quasiment aussi cher qu’une bergerie, alors que ces abris sont utiles seulement une partie de l’année. »

Jérémi Jaoul s’en sert toute l’année. L’abri situé à 2,5 km du siège est un moyen d’éviter un aller-retour quotidien avec ses brebis à viande 100 % plein air jusqu’à cet îlot de 30 hectares de prairies. Autre constat : « Le loup a attaqué à 5 km d’ici. Nous pouvons rentrer le troupeau quand il approche. » Et il ajoute : « On nous dit que le loup est la clé de voûte de la biodiversité, mais il faut aussi parler de la brebis. Si elle ne pâture plus — ce qui peut arriver quand des éleveurs abandonnent des parcours — les milieux se ferment. Et des milieux ouverts, ce sont des agriculteurs qui y vivent avec leur famille. »