En ce début de juillet, sur les 2 800 m de la piste de Vichy, les chevaux, attelés de leur sulky (la petite voiture qui porte le conducteur) s’élancent. Charles Duchier est descendu de sa moissonneuse pour être au premier rang. Il est passionné de courses. Petit-fils d’entraîneurs-éleveurs, il passait ses journées sur les hippodromes. Mais il n’est pas venu pour parier au quinté +. Son dada, c’est l’entraînement des chevaux, leur apprendre à trotter sans galoper, au minimum 1 heure tous les deux jours. « Mes chevaux participent à une quinzaine de courses par an, j’essaie de faire le déplacement, mais je n’ai pas toujours le temps », précise-t-il.
Éleveur allaitant à Culan, dans le sud du Cher sur 480 hectares, Charles cultive aussi des céréales qui servent à l’alimentation des poules pondeuses, un atelier développé avec sa femme Émilie. Et bien sûr, il s’occupe de deux juments pour la reproduction. S’il est accro aux chevaux depuis son enfance, Charles a construit son entreprise et sa famille — il est l’heureux papa de quatre fils — avant de revenir à sa passion vers trente ans. Il s’organise alors pour se libérer du temps sur la ferme, « je suis bien entouré », précise-t-il.
Champion à Vincennes
La réglementation impose d’avoir gagné trois courses avant d’obtenir le titre d’entraîneur-amateur. Aujourd’hui, il a le droit de débourrer ses poulains, puis les laisse à un autre entraîneur et les récupère à l’âge de cinq ans. « C’est frustrant, j’aimerais les élever de A à Z », concède-t-il. Pour cela, il faudrait gagner plus de courses… Comme en 2023, au temple du trot. Ce jour-là, Charles fait le déplacement de Culan à Vincennes, avec ses quatre fils et son trotteur favori, Funky Berry. Perché sur son sulky, il est très concentré. « Je ne pensais qu’aux pattes de mon cheval. »
L’équidé se place en troisième position, côté corde. Il est quatrième quand il démarre la ligne droite finale. « Il a fait une remontée fulgurante dans les 150 m », commente Charles, avec son visage doux et juvénile. Au moment du passage de la ligne d’arrivée, Funky Berry est en ballottage. « J’ai su que j’avais gagné en regardant le grand écran. J’ai immédiatement pensé à ma grand-mère de 93 ans qui devait être devant sa télé. » L’entraîneur gagne 5 000 €, une belle somme, mais pas suffisante pour couvrir les frais des autres chevaux qui ne courent pas. Néanmoins, il n’a pas dit son dernier mot et vient de transmettre sa passion à son fils, Ernest.