À presque 70 ans, Isabelle Janin se plaît toujours à convoquer les souvenirs de son enfance passée à la ferme. Des bruits lui reviennent comme le bourdonnement des abeilles aux abords des ruches de son père ou le raffut de la faucheuse à cheval qu’elle conduisait avec son grand-oncle. Ces expériences à la fois anodines et marquantes ont éveillé ses sens et forgé la personne qu’elle est devenue : une femme au service de la biodiversité, jamais à court de projets et dotée d’un inépuisable sens du collectif. « J’ai toujours été à l’écoute de ce qui m’entoure, que ce soit la nature ou les gens », remarque-t-elle modestement.
Sensibilisée dès l’âge de 17 ans à l’agriculture biologique grâce aux conférences de l’agronome René Dumont, elle a ensuite mis toute sa ténacité à porter ce modèle d’agriculture respectueux de l’environnement. Dans sa ferme, d’abord, convertie dès 1992 en bio. Mais surtout au-delà, notamment via l’association Agribio dans laquelle elle s’est investie pendant près de 30 ans. Depuis 2021, elle préside l’association Étamine qui dispose d’un espace-test de 13 ha en agriculture biologique permettant à des jeunes d’expérimenter leur projet pendant trois ans. « J’aime transmettre, être au contact des jeunes et leur donner le plus de chance possible. »
Une « retraite » mouvementée
Consciente des nombreux obstacles que peuvent rencontrer les jeunes au moment de leur installation, l’ancienne agricultrice voit cet espace-test comme un moyen d’accompagner le projet professionnel mais aussi le projet de vie des testeurs. « Et quand bien même l’un d’entre eux décide d’arrêter, nous ne voyons pas cela comme un échec », considère-t-elle. Sur le territoire roannais, l’espace-test a créé une dynamique importante. Trente maraîchers bio y sont désormais installés contre seulement quatre il y a dix ans.
Grâce à sa volonté et son énergie, Isabelle Janin a accompli bien plus que son rêve de petite fille de devenir agricultrice. Aujourd’hui à la « retraite », ce mot ne lui sied guère tant elle reste impliquée dans une multitude de projets. Elle partage son temps entre l’espace-test, la ferme familiale où elle donne volontiers un coup de main à son fils Rémi qui a repris l’exploitation, sans oublier ses petits-enfants à qui elle dédie avec joie tous ses mercredis.