« Je ne m’identifiais pas aux gens de la ville, je n’avais pas les mêmes valeurs, ni les mêmes envies. En entreprise, le côté humain me manquait. J’avais du mal à faire confiance aux personnes, et j'avais besoin de plus d’authenticité. » Émilie Rizzo quitte Paris enceinte de son premier fils, afin de passer ce temps avec sa famille. Diplômée d’une école parisienne de stylisme, elle avait touché du doigt la réalité de la surconsommation textile, et choisit de faire une volte-face courageuse.
Du monde de la mode à la Haute-Loire
En 2012, la jeune styliste tourne cette page de sa vie. Elle s’éloigne des maisons de haute couture, et de la fabrication du prêt-à-porter. Son compagnon Guillaume a lui aussi grandi dans une petite commune de la Haute-Loire. Le couple a ainsi préféré vivre et élever ses deux garçons au Bas-en-Basset, un petit village au bord de la Loire, tranquille et très ensoleillé.
En plein confinement, Émilie et Guillaume se rapprochent de leur voisin Patrice, éleveur ovin : « Nous avions perdu cette habitude des moments simples, à discuter. » L’Altiligérienne (habitante de la Haute-Loire) comprend mieux la réalité économique de cette profession : « Les éleveurs paient le tondeur. S’ils ne vendent pas la laine, c’est une perte sèche. »
Après avoir rencontré d’autres agriculteurs, elle s’instruit sur ce matériau naturel aux Ateliers de la Bruyère qui transforment la laine, à Saugues. Bien décidée à valoriser la laine locale, la jeune entrepreneuse est sélectionnée et accompagnée par un incubateur de Saint-Etienne, et des mentors. Ils bâtissent un business-model (modèle d'affaires), et six mois intenses, en École de commerce à Lyon, lui sont nécessaires pour devenir compétente en comptabilité et en marketing.
Lancer sa marque
Celle qui rêvait adolescente de lancer sa marque de vêtements crée sa collection de produits de literie durables, pure laine : des couettes, oreillers et surmatelas, qui se veulent douillets et sains car thermorégulateurs. Sa SAS 6h55 fabrique en Haute-Loire, dans une entreprise du patrimoine vivant (EPV).
Pour convaincre, Émilie se rend sur des salons et s’expose sur Instagram. Elle explique sa démarche d’une literie sans fibres issues de la pétrochimie. « Je n’ai jamais eu peur de me lancer. Il faut être un peu kamikaze, et prête à perdre l’argent, au début », assume cette quadra, déterminée et lucide.
Le label « Entreprise du Patrimoine Vivant » (EPV) est une marque de reconnaissance de l’État français qui distingue les entreprises françaises aux savoir-faire artisanaux et industriels d’excellence.