« La coupe de la queue des porcs est interdite en routine mais reste pratiquée dans de nombreux élevages pour réduire les risques de caudophagie », indique Yannick Ramonet, ingénieur d’études à la chambre d’agriculture de la Bretagne, rappelant que la morsure est un acte comportemental.

Logement, ventilation, alimentation ou encore conduite des porcs, les facteurs de risque sont nombreux. « Ils interagissent entre eux, de sorte qu’il est souvent compliqué de trouver une solution qui réponde à l’ensemble des paramètres », explique l’ingénieur.

Suivi de l’évolution des queues

Après plusieurs essais, en 2023, la station expérimentale de Crécom (Côtes-d’Armor) a intégré l’arrêt de la caudectomie dans sa routine. La chambre d’agriculture de la Bretagne a alors lancé une étude pour évaluer l’impact de cette décision sur l’état des queues et les performances des animaux.

Cinq bandes complètes de porcs sur caillebotis ont été élevées sans coupe de la queue. Un total de 1 020 porcs est entré en postsevrage (PS) et la majorité d’entre eux a été suivie depuis le PS jusqu’au départ de l’élevage. L’état des queues a été évalué à l’aide d’une grille de notation allant de 0 (aucune marque visible) à 3 (plaies graves). En fin de PS, 80 % des animaux ne présentaient pas de marques (note entre 0 et 1) et 10 % des animaux avaient des lésions profondes à la queue (note 3). À ce stade, l’effet de la bande est significatif sur la présence de plaies. 10 % du nombre de cases de PS concentrent 61 % du nombre total de porcs à note 3.

Entre le PS et l’engraissement, une amélioration de l’état des queues est observée pour 32 % des animaux, une dégradation pour 23 % et l’état reste stable pour 45 %. Seuls 5 % des animaux ont des lésions profondes en fin d’engraissement. Les poids des animaux victimes de ces blessures, ainsi que leur vitesse de croissance, sont réduits par rapport aux animaux sans ou avec des blessures légères.

En fin de PS : –0,7 kg en moyenne en lien avec un GMQ inférieur de 24 g par jour. En fin d’engraissement : –3,5 kg et un GMQ inférieur de 64 g par jour. Le poids économique des pertes et saisies est également important, sans qu’il soit possible de l’évaluer compte tenu de la difficulté de lier les saisies à l’abattoir à l’état des queues.

Enrichir le milieu de vie

« La conduite des porcs à queue non coupée s’accompagne dans notre station d’une surveillance accrue, du déplacement d’animaux en infirmerie, de l’apport d’enrichissement, souligne l’ingénieur. Il faut veiller à respecter les recommandations en matière de densité d’élevage, assurer une alimentation équilibrée et un accès suffisant pour tous les animaux. » L’enrichissement du milieu de vie avec de la paille et des objets à manipuler permet d’encourager les comportements naturels.

Il est important de surveiller le comportement des porcs pour identifier les premiers signes de morsures de queues et intervenir rapidement. « La surveillance et les interventions nécessaires peuvent alourdir la charge de travail des éleveurs (temps passé pour la surveillance, apport d’enrichissement, traitements médicamenteux), impactant aussi le coût de l’arrêt de la caudectomie », conclut Yannick Ramonet.

(1) Il intervenait lors des Journées de la recherche porcine organisées par l’Ifip les 4 et 5 février 2025 à Saint-Malo.