« Il nous faut inscrire l’élevage en plein air dans le code rural », a plaidé Manon Meunier (Haute-Vienne, La France insoumise), lors des discussions en commission des affaires économiques sur le budget prévu à l’agriculture dans le projet de loi de finances pour 2026, le 22 octobre 2025. La députée, rapporteure pour avis sur la mission « Agriculture », a pointé du doigt une problématique réglementaire qui, selon elle, pénalise les éleveurs de porcs en plein air.

Un modèle ultra-minoritaire

En France, la production porcine reste à 95 % issue d’élevages en bâtiments, rappelle-t-elle. La production de porcs en plein air représente donc une fraction marginale de la filière. Pourtant, ce modèle présente plusieurs atouts, du point de vue de la députée : il « s’ancre sur les territoires, utilise souvent des aliments produits localement, est beaucoup plus autonome et intéressant pour la préservation des races anciennes et donc de la diversité génétique, qui va être absolument fondamentale pour faire face aux crises climatiques et sanitaires ».

Le cœur du problème réside dans l’application des mesures de biosécurité, qui s’appliquent à tous les élevages porcins, sans distinction entre les systèmes en bâtiment et en plein air. « Ça n’a plus aucun sens, a lancé la députée. Bien sûr qu’il nous faut des normes de biosécurité pour le plein air, mais mettre un sas de désinfection entre deux parcelles, ou entre deux bâtiments, c’est différent. » Ces contraintes réglementaires entraînent notamment des hausses de coûts, nécessitent des installations plus complexes et conduisent à l’abandon de projets par des porteurs confrontés à des freins financiers et techniques trop lourds.

Une expérimentation lancée en 2024

Une expérimentation nationale a d’ailleurs été lancée en mars 2024, impliquant 144 exploitations (dont 52 élevages porcins) réparties sur l’ensemble du territoire. Cette démarche vise précisément à adapter les règles de biosécurité aux spécificités des élevages en plein air. Mais les conclusions, initialement attendues pour mai 2025, n’ont pas encore été rendues.

Parallèlement, Manon Meunier a souligné la nécessité d’un suivi plus individualisé par les Directions départementales de la protection des populations (DDPP), ce qui suppose « évidemment la hausse des effectifs » de ces services actuellement sous tension.

Un consensus transpartisan

Les préoccupations de Manon Meunier ont recueilli le soutien du député Stéphane Travert (Manche, Ensemble pour la République), ancien ministre de l’Agriculture et président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée. « Il n’est pas normal qu’un éleveur de porcs en plein air, qu’il soit bio ou conventionnel, soit soumis aux mêmes déclarations sanitaires qu’une production en bâtiment, car les bases sont différentes, a-t-il déclaré. Nous avons un gros travail à faire pour essayer d’apporter des améliorations pour celles et ceux qui veulent s’orienter vers le plein air. »

L’ancien ministre a également rappelé qu’en 2018, dans le cadre des plans de filière, la France s’était fixée pour objectif de doper sa production en plein air et en bio. « On en est encore loin », a-t-il regretté, évoquant les crises sanitaires et internationales qui ont ralenti cette ambition.

Baisse du nombre d’élevages bio

Selon les données publiées par l’Institut du porc (Ifip) en septembre 2025, le nombre d’élevages produisant du porc bio a diminué de 7 % en 2024. La filière a perdu 44 éleveurs entre 2023 et 2024, même si une dizaine d’exploitations étaient en conversion. En 2024, 15 849 truies étaient comptabilisées en agriculture biologique, en baisse de 6 % par rapport à 2023.

Cette prise de parole de Manon Meunier et le soutien exprimé par Stéphane Travert constituent donc un signal important. La question de la reconnaissance spécifique de l’élevage en plein air dans le Code rural pourrait émerger dans les prochains textes législatifs.