Dissocier maltraitance et bien-être animal

Alors que les Français semblent se passionner de plus en plus pour la cause animale, c’est sur ce sujet que Jean-Jacques Bourdin a choisi d’engager l’interview du ministre de l’Agriculture, en commençant par une triste actualité : les mutilations d’équidés au champ. Plus de trente actes auraient été constatés dans une quinzaine de départements, d’après le ministre, qui a assuré que « beaucoup de moyens d’enquête » ont été mobilisés. « L’enquête avance, elle est prise très au sérieux », a-t-il répété à plusieurs reprises, promettant que « justice sera faite » contre ces « actes d’incroyable barbarie ».

 

À lire aussi :Actes de cruauté, les conseils de la gendarmerie aux propriétaires de chevaux (27/08/2020)

 

Interrogé ensuite sur le référendum d’initiative partagée (RIP) pour le bien-être animal, Julien Denormandie a regretté que la question de la maltraitance soit associée à celle du bien-être animal. « La maltraitance, il faut être intransigeant dessus ; le bien-être, il faut l’accompagner », a-t-il déclaré. Quant au RIP, il s’y est dit défavorable « à titre personnel », estimant que « ce n’est pas le bon véhicule : on ne répond pas par oui ou par non à une telle question. »

 

Évoquant l’élevage intensif, auquel le RIP voudrait mettre fin, il a questionné : « Si le système de production du jour au lendemain change, est-ce que tout le monde est prêt à mettre le prix ? Il y a beaucoup de nos éleveurs qui ne vivent même pas de leur activité. » Le ministre a également évoqué les « questions d’aménagement du territoire » qui se poseraient si tous les animaux d’élevage se retrouvaient demain dans les champs. « Ne soyons pas manichéens ! La nature, ce n’est pas bien ou mal », a-t-il poursuivi.

Pour une écologie du « bon sens »

Au sujet des néonicotinoïdes, le ministre a indiqué qu’un projet de loi serait présenté jeudi en conseil des ministres pour permettre « des dérogations quand il y a urgence sanitaire ». Si les cultures concernées par ces dérogations ne seront pas précisées, Julien Denormandie a insisté : « L’objectif de cette loi, c’est uniquement la betterave sucrière. » Une exception justifiée par l’absence d’alternative.

 

« Quel est le sens d’une écologie si demain tout notre sucre est belge ou allemand et produit de manière inférieure aux normes qui sont les nôtres ? […] C’est une question d‘indépendance et de souveraineté, et une question évidemment de bon sens. La betterave on peut, à la différence d’autres cultures, parce que la betterave ça ne fait pas de fleurs. Donc sauf si vous êtes une abeille aveugle, complètement paumée et avec aucun sens de l’orientation, vous ne vous retrouvez pas dans un champ de betteraves. »

Relancer pour durer

Sur le plan de la relance, le ministre a affirmé que l’agriculture obtiendrait une part « très importante », mais sans avancer de chiffre car les arbitrages doivent se poursuivre jusqu’à jeudi. Il a cependant indiqué trois axes dans lesquels ces financements pourront intervenir afin de conforter le secteur agroalimentaire dans la durée : la lutte climatique (financement d’agroéquipements), l’indépendance et la souveraineté alimentaire (plan protéines) et les investissements dans les abattoirs.

Manger français

Julien Denormandie a ensuite répété son attachement à la souveraineté alimentaire de la France et a promis de lutter contre les pratiques trompeuses en matière d’étiquetage de l’origine : « Je ne laisserai rien passer. » Reconnaissant que les dynamiques créées par la loi Egalim restent « très insuffisantes » dans certaines branches, comme la viande, il a promis d’être « très exigeant dans l’application de cette loi ».

 

Le ministre souhaite également « expliquer aux Français que manger un poulet français n’a rien à voir avec manger un poulet brésilien, en termes de goût, ni en termes de nutrition ». Julien Denormandie s’est également dit déterminé « pour qu’on mette des normes environnementales fortes » dans la nouvelle Pac, mais à une condition : « Ça veut dire qu’il faut être incroyablement exigeant vis-à-vis de tous les pays tiers dans tous les accords commerciaux. »