À la demande du Premier ministre, en relation avec les ministères en charge de l’Agriculture et l’Écologie, l’Inrae (institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) a mené une évaluation économique des pratiques alternatives au glyphosate en arboriculture.
Ce rapport va plus loin que celui de 2017 sur les alternatives au glyphosate (Reboud et al. 2017) et détaille l’importance des choix d’enherbement et d’écartement des rangs.
Publié le 14 février 2020, il vise aussi à fournir à l’Anses des éléments sur les impacts économiques du retrait du glyphosate. L’agence doit en effet se prononcer en 2020 sur le renouvellement des autorisations de mise en marché (AMM) des produits contenant cette molécule car le règlement européen 1107/2009 (article 50) mentionne que le retrait peut se faire s’il existe des alternatives d’usage courant, sans impact environnemental et sans impact économique majeur.
De 120 € à 432 €/ha
Le rapport met en évidence l’existence d’un surcoût lié à la sortie du glyphosate pour les vergers existants, du fait des particularités du désherbage mécanique : achat de matériel, temps de travail, blessures éventuelles des racines par les outils, modification nécessaire du système d’irrigation.
Ainsi s’il est largement pratiqué, notamment en agriculture biologique, et fait l’objet de travaux d’expérimentations par plusieurs organismes de R & D, le désherbage mécanique en vergers (avec ou sans enherbement) reste difficile à maîtriser.
Quant aux surcoûts estimés par l’institut (à l’aide des données de l’enquête sur les pratiques culturales de 2015), ils confirment les résultats publiés par les instituts techniques et organismes professionnels sur le sujet, et montrent l’importance des surcoûts rapportés aux différents indicateurs de performance économique. Ainsi, le surcoût des alternatives au désherbage chimique s’étendrait de 120 €/ha dans le cas le plus favorable jusqu’à 432 €/ha.
Renouvellement et aides
« En revanche, ces éléments peuvent être pris en considération lors du renouvellement des vergers, en utilisant des porte-greffes présentant un système racinaire plus profond et en installant un système d’irrigation adapté, ajoute l’Inrae. La durée de vie des vergers étant limitée, ce renouvellement, et les aides éventuelles permettant de l’accompagner, serait de nature à atténuer l’impact de la sortie du glyphosate. »
« La question de la possible valorisation par l’arboriculteur de la non-utilisation d’herbicides par des prix plus élevés, via par exemple une signalisation au consommateur, se pose, considère également l’Inrae. C’est évidemment le cas en agriculture biologique (voir résultats Dephy-Expe dans Labeyrie et al. 2018). Dans les autres cas, cela dépend largement des marchés de destination des produits. Mais on peut penser que l’importance de l’exportation (qui représente de l’ordre de la moitié du marché de la pomme ou de la noix) ou la concurrence d’autres pays européens sur le marché national (pour l’abricot ou la pêche) limitent les marges de manœuvre des producteurs sur cet aspect. La question de la distorsion de concurrence vis-à-vis des autres pays européens, ayant encore accès au glyphosate se pose alors avec acuité. »