« Le revenu des agriculteurs ne doit pas être la variable d’ajustement dans les négociations commerciales entre les industriels et les distributeurs ». Pour le garantir, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, a annoncé le 1er février 2024, aux côtés d’autres ministres, des « contrôles massifs » pour faire respecter les dispositions des lois Egalim. Ces lois encadrent les négociations commerciales des marques nationales qui se sont clôturées cette nuit à minuit.

Quatre industriels ont reçu une pré-injonction

Une partie des mesures présentées ce jeudi par le ministre de l’Économie avaient déjà été en partie annoncées le 26 janvier à la suite du dernier comité de suivi des négociations commerciales. 150 agents de la DGCCRF, services de la répression des fraudes sont mobilisés. Les contrôles seront multipliés par deux par rapport à 2023 a assuré le ministre. En cas de sanction, les amendes pourraient s’élever jusqu’à 2 % du chiffre d’affaires.

« 250 contrôles sont déjà prévus chez les plus grands industriels » a annoncé Bruno Le Maire tout en confirmant que « quatre procédures de pré-injonction ont été lancées mardi [le 30 janvier 2024] à l’encontre de 4 industriels pour absence de contractualisation avec les agriculteurs ». Selon des informations de BFMTV du 27 janvier 2024, deux filiales du groupe Bigard et la Laiterie de Saint-Malo en feraient partie. Des informations que cette dernière et le groupe Bigard ont démenties.

« Ce sont des contrats qui peuvent faire plusieurs centaines de pages, cela demande un travail technique considérable ».

Concernant la grande distribution, « toutes les plus grandes chaînes de supermarchés seront contrôlés dans les prochains jours sans exception » assure Bruno Le Maire. Plus de 500 contrats devraient être passés au crible par les services de la répression des fraudes. Un examen qui peut prendre du temps. « Ce sont des contrats qui peuvent faire plusieurs centaines de pages, cela demande un travail technique considérable », prévient le ministre de l’Économie.

Il a ajouté que les contrats de marques de distributeurs seront aussi visés afin de vérifier qu’ils respectent les « exigences de formalisation du coût de la matière première ».

Les centrales d’achat européennes dans le viseur

Pour contourner les dispositions des lois Egalim, des distributeurs ont délocalisé leurs négociations en dehors de nos frontières comme à Bruxelles, à Madrid ou à Amsterdam. Alors que la « plupart des distributeurs ont désormais recours à cette pratique », Bruno Le Maire a rappelé que « la loi française s’applique totalement, intégralement, rigoureusement aux négociations hors de France de tous les produits qui sont vendus en France ».

Des contrôles seront là aussi réalisés par la DGCCRF et des sanctions pourront être prises. « J’ai déjà eu l’occasion de le faire pour un distributeur pour une amende de plus de 6 millions d’euros. Je n’hésiterai pas à sanctionner aussi lourdement les distributeurs contourneraient la loi française par des centrales d’achat européennes », a prévenu le ministre.

« Un Egalim européen »

Pour améliorer l’efficacité de ces centrales d’achat européennes, le ministre de l’Économie veut lancer à l’été « une initiative européenne pour renforcer et durcir le cadre applicable » à ces négociations.

(© Alexis Marcotte)

Avant l’intervention de Bruno Le Maire à l’Hôtel de Matignon ce 1er février, Gabriel Attal avait annoncé vouloir un « un Egalim européen ». « Car il y a un sujet sur les centrales européennes d’achat : cette préoccupation du revenu est évidemment européenne, et on mènera donc un combat pour que les agriculteurs européens soient mieux protégés face aux géants », a précisé le Premier ministre. Un Egalim européen également réclamé par Emmanuel Macron dans la soirée alors qu’il était en déplacement à Bruxelles.

10 000 contrôles sur l’origine française des produits

En même temps que ces contrôles prévus pour faire respecter les lois Egalim, Bruno Le Maire a également annoncé que 10 000 contrôles allaient être ordonnés pour vérifier l’étiquetage sur l’origine française.

« Quand un poulet est présenté avec un drapeau français sur l’emballage, le consommateur est fondé à penser qu’il a été produit en France. Trop souvent, ce n’est pas le cas », a-t-il pris exemple. Les industriels et les distributeurs qui se risqueraient à tromper le consommateur pourraient se voir prononcer une sanction allant jusqu’à 10 % de leur chiffre d’affaires.

Un rapport sur Egalim annoncé pour le printemps

Pour terminer son intervention, Bruno Le Maire a présenté le lancement d’une mission d’évaluation de l’application des lois Egalim et des négociations annuelles « avec l’ensemble des parties prenantes ».

Un rapport et des recommandations sont annoncés pour le printemps. « Elles pourront ouvrir la voie à une amélioration et un renforcement d’Egalim », a souligné le ministre de l’Économie.