Le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) vient de publier la situation au 1er janvier 2023, concernant le mois de décembre 2022. "La situation n'est pas satisfaisante avec la plupart des niveaux qui sont sous les normales, a détaillé Violine Bault, hydrogéologue au BRGM, lors d'une conférence de presse le 13 janvier 2023. C'est l'héritage du cycle hydrologique de 2021-2022 et d'un début de recharge en 2022-2023 qui est tardif et déficitaire."
À l'entrée de l'hiver 2021, les niveaux étaient pourtant très satisfaisants. Mais finalement, il y a eu une recharge très déficitaire en 2021-2022, avec en moyenne –70 % par rapport à une recharge normale. Ensuite, en fin de période de recharge, la situation s'est encore dégradée avec des niveaux proches de la moyenne sur un tiers du territoire, et modérément bas à bas sur le restant.
Baisse des nappes dès février
Durant l'été 2022, les niveaux des nappes sont restés bas, sachant que la baisse avait commencé dès le début de février, ce qui reste assez exceptionnel. Il y a eu des dégradations progressives de l'état des nappes avec des situations préoccupantes sur les nappes du Sud-Est (Provence et Côte d'Azur), du Centre-Est (couloir Rhône Saône) et Centre-Ouest (Maine, Touraine, Poitou, Brenne, Vendée). "Durant le printemps la dégradation a été rapide à cause notamment des prélèvements agricoles compte tenu de températures élevées et du manque de précipitations", estime le BRGM.
Les arrêtés de restriction des prélèvements ont ensuite joué leur rôle en juillet-août avec une décharge des nappes ralentie. "On a vu ainsi qu'elles baissaient moins rapidement qu'habituellement, ce qui a permis de casser la dynamique de baisse", ajoute Violine Bault. Les pluies de l'été, peu nombreuses, n'ont pas vraiment eu d'impact sur les eaux souterraines. En effet, elles bénéficient à cette période surtout aux cultures.
Tendances inversées en novembre-décembre
Durant l'automne, habituellement les nappes doivent se recharger à partir d'octobre avec les premières pluies, mais il y a eu une période de basses eaux sur la majorité des nappes en septembre et octobre 2022. "C'est un évènement que l'on ne voit quetous les 10 à 20 ans sachant que sur certains secteurs on atteignait même des niveaux historiquement bas comme sur Nice jamais vus depuis 100 ans", insiste l'hydrogéologue.
Avec plus d'un mois de retard, les niveaux ont commencé à monter à partir de novembre, avec une exception pour le Grand Est où la recharge a débuté en octobre. Les pluies étaient insuffisantes et avec les températures douces, la végétation est restée active jusqu'en novembre, consommant l'eau qui n'arrivait pas à aller plus en profondeur pour recharger les nappes. Les tendances n'ont finalementcommencé à s'inverser qu'en novembre, voire décembre.
Sous les normales
Cela explique pourquoi en décembre, il y a des niveaux de nappes inférieurs aux normales mensuelles. Et il y a toujours des situations préoccupantes dans le Sud-Est (est de la Côte d’Azur) avec des niveaux historiquement bas (jamais vus depuis 50 à 100 ans), les nappes du Centrées (Dijonnais Bresse et Bas-Dauphiné) et celles du Centre-Ouest (Maine, Touraine, Poitou, Périgord).
La comparaison avec janvier 2022, montre que les niveaux étaient alors nettement supérieurs. Si en 2023 la recharge s'arrête aussi en février, le BRGM estime que la situation pourrait être beaucoup plus dégradée que la campagne précédente.
Prévisions pessimistes
Les prévisions du BRGM pour 2023 sont plutôt pessimistes puisque le début de la recharge a été tardif et que les pluies ont été très insuffisantes avec notamment un étiage très sévère en octobre. Pour les nappes inertielles, sur le Bassin parisien-Artois, il faudrait des pluies excédentaires avant le printemps pour retrouver des niveaux normaux. Et sur le couloir Rhône-Saône, la reconstitution des réserves est difficilement envisageable d'ici au printemps.
Concernant les nappes réactives, des pluies abondantes et perdurant jusqu’au printemps pourraient permettre de retrouver des niveaux satisfaisants. Cependant, en cas de précipitations insuffisantes, la vidange pourrait reprendre et l’état des nappes se dégrader. "S'il ne pleut pas suffisamment, les arrêtés de restriction en eau risquent effectivement de tomber plus tôt en saison, avec des interdictions de prélèvements pour l'irrigation plus précoces qu'en 2022", conclut le BRGM.