Réduction du travail du sol, pneumatiques basse pression, interventions uniquement sur sol portant : vous avez multiplié les bonnes pratiques pour préserver la structure de votre sol pendant toute la campagne. Pourtant, le jour de la récolte, c’est un monstre de plus de 30 tonnes qui va entrer dans la parcelle et matraquer la structure du sol en profondeur. Avec une moissonneuse-batteuse, la charge est cyclique, c’est-à-dire qu’elle peut varier de plus de 12 tonnes entre deux vidanges de la trémie. Il en va de même pour une arracheuse intégrale, qui intervient en plus sur un sol souvent humide.
Jusqu’à 4 bars
Une moissonneuse-batteuse pèse en moyenne 20 tonnes. À ce poids, il faut ajouter environ 4 tonnes pour la barre de coupe, ainsi que le poids trémie pleine. Ce dernier varie de 6 à plus de 13 tonnes, selon le grain récolté et la capacité de la trémie. Dans le meilleur des cas, le poids de la moissonneuse-batteuse à pleine charge atteint 30, et dépasse parfois 40 tonnes. On estime généralement que 75 % de ce poids est porté par l’essieu avant, en raison de l’important report de charge provoqué par l’outil frontal. Cela signifie donc que cet essieu supporte près de 28 tonnes, soit 14 par pneumatique. Afin de supporter cette charge ponctuelle lorsque la trémie est pleine, il n’y a pas d’autre solution que d’augmenter la pression, qui peut atteindre 4 bars sur un pneu classique.

Dans leurs abaques de charge, les manufacturiers préconisent de ne pas dépasser 3,2 bars, mais il est possible de monter à 4 pour l’activité cyclique de la moisson. Dans ce cas, Stefan Denayer, chef produit pneumatiques agricoles chez Bridgestone, rappelle que le bonus de charge de 55 % qu’il est possible d’obtenir avec cette pression impose le respect de certaines conditions, notamment de ne pas dépasser une distance de plus de 1,5 kilomètre en capacité maximale. En outre, la vitesse doit être nettement réduite, et il est dangereux d’évoluer dans des pentes à plus de 20 %. Toutes ces précautions garantissent la sécurité du chantier, mais n’empêchent pas le tassement du sol en profondeur, provoqué par la très grande pression dans les pneumatiques.
Pneus spécifiques
Une solution pour préserver davantage la structure du sol est l’emploi de pneus conçus pour supporter les bonus de charge. Ceux-ci sont de type CFO (pour Cyclic Field Operation, opérations ou activités cycliques). Comme pour les tracteurs, ils utilisent les technologies IF et VF, mais la construction de leur carcasse est différente. En effet, l’objectif d’un pneu de tracteur est de proposer un grand couple de traction, tandis que celui d’une machine de récolte doit supporter beaucoup de poids avec un couple de traction moindre.
Les pneumatiques IF et VF, caractérisés par une plus grande flexion de leurs flancs, offrent une surface d’empreinte au sol supérieure à celle des carcasses traditionnelles, donc un tassement plus réduit. Selon les manufacturiers, la combinaison idéale pour augmenter ponctuellement la charge est d’avoir un pneu IF CFO à l’avant et un VF CFO à l’arrière, pour supporter plus de charge sur la route lorsque la barre de coupe est dételée. Les CFO permettent de maintenir une pression de 2,4 bars là où les pneus standards ont besoin de 4 bars. Le bonus de charge atteint 86 %, contre 55 % en standard. En revanche, les restrictions sur la vitesse de travail, la pente et la distance maximale de 1,5 kilomètre à pleine charge sont les mêmes. Reste à calculer la rentabilité d’un tel investissement par rapport à un pneumatique standard, voire à des chenilles pour les machines de très grosse capacité.
Corinne Le Gall