La méthanisation a-t-elle un impact sur la qualité de l’air ? En plein essor ces dernières années, la méthanisation (agricole notamment) interroge les riverains situés à proximité des installations quant à son impact sur les odeurs et la qualité de l’air.
Pour mieux décrire les polluants et odeurs dégagés par les méthaniseurs, les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) de six Régions de France, à savoir Auvergne-Rhône-Alpes, Grand Est, Hauts-de-France, Nouvelle-Aquitaine, Normandie et Pays de la Loire, ont lancé en 2021 le projet Aqametha, indique un communiqué de presse d’Atmo France (1) diffusé le 25 juin 2024. Ce projet d’envergure nationale est cofinancé par l’Ademe et GRDF.
12 méthaniseurs étudiés
Douze unités de méthanisation, en cogénération et en injection, ont été sélectionnées puis étudiées de manière à obtenir un échantillon représentatif de la filière nationale. La sélection des unités sur le territoire s’est faite selon plusieurs critères tels que le type d’installation, le type d’intrant ou le caractère sensible de l’installation (distance des premières habitations, plainte des riverains connue), sur la base du volontariat.
Le but d’Aqametha ? Fournir aux acteurs de la méthanisation, au monde agricole, aux pouvoirs publics ainsi qu’au grand public une vision objective de l’impact atmosphérique de la méthanisation. L’étude s’est focalisée sur l’exposition aux odeurs et polluants cibles (ammoniac et hydrogène sulfuré) issus de la méthanisation, « considérés comme des indicateurs clés de ce processus et la gêne principale perçue par les riverains ».
Des nuisances olfactives faibles au-delà de 230 mètres
La nature et l’intensité des odeurs issues de l’activité de méthanisation ont été mesurées en 2022 et 2023. Pour chaque méthaniseur, deux séries de mesures olfactives ont été réalisées, en été et en automne, pour prendre en compte l’éventuelle influence de la saisonnalité sur la formation et la dispersion des molécules odorantes dans l’environnement.
« L’analyse de la dispersion des odeurs révèle qu’à proximité des installations (entre 0 et 230 mètres), l’intensité des odeurs diminue rapidement d’une forte à moyenne intensité », rapporte l’étude. Au-delà de 230 mètres, l’intensité odorante varie en fonction de l’installation. Elle devient alors faible entre 230 et 2 300 mètres de la source.
Plus généralement, les postes les plus odorants sont le stockage des intrants, en particulier les intrants d’origine animale, et les trémies en extérieur permettant l’alimentation du digesteur. En outre, « les phénomènes de fermentation et de dégradations organiques sont le plus souvent associés aux intensités odorantes les plus élevées ».
Des polluants dans l’air en dessous des seuils
Comme pour les mesures olfactives, des échantillonneurs passifs ont mesuré les concentrations dans l’air de l’hydrogène sulfuré et de l’ammoniac, à diverses distances de l’unité, au niveau des zones habitées, en juin et octobre 2022 et 2023. Selon l’étude d’Atmo France, les teneurs relevées près des douze méthaniseurs ne présentent pas de risque pour la santé humaine.
Des niveaux plus élevés d’ammoniac ont été observés en limite de propriété, qui décroissent rapidement avec la distance. Les valeurs enregistrées durant la période restent inférieures à la valeur toxicologique de référence de l’Anses (500 µg/m³ sur un an).
En moyenne, la concentration en ammoniac mesurée sur l’ensemble des unités en limite de propriété atteint 12,5 µg/m³ sur la période. Aux abords des premières habitations, cette concentration moyenne en ammoniac est de 3,8 µg/m³ sur l’ensemble de la période.
Quant aux molécules d’hydrogène sulfuré, de très faibles niveaux ont été mesurés, « à la limite de la quantification c’est-à-dire que les concentrations sont presque en dessous des minimales que l’analyse peut détecter », souligne l’étude.
La concentration moyenne sur l’ensemble des unités en limite de propriété est de 1 µg/m³ sur la période, une valeur nettement inférieure à la valeur guide sanitaire de l’Organisation mondiale de la santé (150 µg/m³ sur 24 heures). Pour les premières habitations, la concentration moyenne, mesurée sur l’ensemble des unités sur la période, est de 0,4 µg/m³.
Les résultats définitifs du projet Aqametha seront publiés au premier semestre de 2025. Un rapport complet d’analyse « présentera le protocole, les résultats des 12 unités investiguées au niveau national, et apportera des préconisations à l’intention des exploitants », explique Atmo France.
(1) Atmo France est la fédération du réseau national des Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA).