Une installation atypique de méthanisation a vu le jour à Vraignes-en-Vermandois dans la Somme en 2022. Il faut dire que les dix-huit associés, agriculteurs dans la Somme et l’Aisne, ont eu le temps de faire évoluer leur projet de production de méthane, puisqu’il remonte à seize ans. « Comme notre sourcing est très diversifié, nous avons opté pour quatre petits digesteurs au lieu d’un gros, pour répartir les risques, explique Rémi Chombart, l’un des associés de Sanamethan. Si pour une raison ou une autre, la fermentation n’est pas à l’optimum dans l’un d’eux, les trois autres continuent à bien fonctionner. »

L’installation qui a nécessité un investissement de 12 millions d’euros, produit 320 Nm³/h de biométhane à 67 bars, qui est injecté dans le réseau GRTgaz. Elle fonctionne à partir de 36 000 tonnes par an de résidus d’industries agroalimentaires (Bonduelle, Tereos, Mousline), de pulpes de betteraves, de cultures à vocation énergétique, et de biodéchets issus du déconditionnement. 15 % du capital est détenu par la Sicae Somme et Cambrésis, Sem Somme Énergie et Sem Énergies Hauts-de-France.

Le choix du froid pour la récupération

Deuxième particularité du site, il produit 5 000 tonnes par an de gaz carbonique liquide en plus du biométhane. « Le biogaz qui sort des digesteurs est composé à 54 % de biométhane et 46 % de CO2 et autres composés organiques volatils, précise Aurélien Desrousseaux, agriculteur à Vauvillers et président de Sanamethan. Nous avons pensé qu’il était dommage de disposer de gaz carbonique et de le rejeter dans l’atmosphère. » Comme dans les autres unités de méthanisation, le méthane est filtré par des membranes Evonik. Pour récupérer le CO2, les associés ont retenu un autre procédé de séparation, par le froid, la cryogénie.

Chaque gaz se solidifie à une température précise, le gaz carbonique à –78,2°C. Il est stocké sous forme liquide dans deux cuves de 50 tonnes chacune. « Entre les boissons pétillantes, les serristes, le lavage industriel, les transports réfrigérés, il existe un vrai marché pour le CO2, note Rémi Chombart. Son prix fluctue de 40 à 150 euros par tonne. » Les associés prévoient d’aller encore plus loin et de produire à partir des matières ligneuses qui restent, par pyrogazéification cette fois, de l’hydrogène. Une source d’énergie dont le marché est embryonnaire, mais qui semble vouée à un bel avenir.