Vincent Brygo fait partie des sept adhérents de la coopérative Unéal à avoir expérimenté la culture de lentille verte l’an dernier. Exploitant environ 140 hectares à Somain près de Valenciennes (Nord), il souhaitait diversifier son assolement dans ses terres sablo-limoneuses et rompre le cycle des adventives.
« Je suis atypique dans la région car je ne fais pas de betterave, ni de pommes de terre ni de légumes d’industrie », souligne l’agriculteur, qui cultive environ 70 ha de blé, 40 hectares de maïs et 24 hectares de colza, sans labour. La lentille a pris la place d’une parcelle de blé de 5 hectares, car moins gourmande en engrais. « La légumineuse amène aussi 40 unités d’azote pour la culture suivante », précise Colombe Decerisy, référente agronomique en protéagineux chez Unéal.
Le semis a été réalisé le 19 avril 2023, avec la variété Anicia. Il s’agit d’une lentille très rustique, avec des reflets bleutés, ce que recherche l’industrie alimentaire. Son seul défaut : elle est sensible à la verse. « J’ai labouré la parcelle car il s’agit d’une nouvelle culture sur l’exploitation et je voulais partir sur de bonnes bases », détaille l’agriculteur, qui a réalisé un passage de vibro deux jours après le labour, puis semé à 90 kg/ha, à une profondeur de 2-3 cm, dans un sol réchauffé.
Un roulage a été effectué le lendemain pour faciliter le chantier de récolte. Aucune unité d’azote n’a été apportée. « Je n’ai pas eu de problèmes de maladies et d’insectes cette année, ce qui m’a évité de traiter, se félicite Vincent Brygo. J’ai seulement désherbé en prélevée avec le mélange Challenge 600 (3 l/ha) + Nirvana (1 l/ha), suivi d’un rattrapage en postlevée avec du Challenge 600 à 1 l/ha. » Ses charges ont atteint seulement 510 €/ha (180 €/ha pour les semences, 80 pour le désherbage, 80 pour le semis et le roulage, 20 pour le passage de pulvérisateur et 150 pour la récolte). En cas d’apports d’engrais, de fongicide et d’insecticide, « les charges peuvent monter à 795 €/ha », chiffre Unéal.
Récolte : étape difficile
La récolte a eu lieu le 25 juillet, à 15-16 % d’humidité juste avant les pluies de l’été. Il ne faut pas de grain de blé dans les lentilles car le cahier des charges exige du 100 % sans gluten. « Comme j’avais moissonné du blé deux jours avant, j’ai vidé les 50 premiers mètres de la parcelle de lentilles dans une remorque à part », signale Vincent. La récolte est l’étape la plus difficile : « La plante s’affaisse au sol, il faut être vigilant et ne pas trop attendre pour moissonner », insiste-t-il. Son rendement a été correct, à 20 q/ha, et il va renouveler l’expérience en 2024, sur une autre parcelle. La culture ne doit revenir que tous les cinq ans. « L’an prochain, nous nous rapprocherons des ETA pour trouver des solutions de récolte plus sécuritaires, même si la lentille est à terre », indique la coopérative.
Une fois moissonnées, les lentilles sont livrées au silo d’Haulchin (Nord) puis sont stockées dans une cellule spécifique à Cléry-sur-Somme (Somme) pour être travaillées avant de partir à l’usine Vivien Paille de Valenciennes afin d’être transformées. Les lentilles sous contrat sont valorisées 900 €/t par Unéal, ce sera la même chose pour 2024. « Cette culture permet de bénéficier de la prime couplée légumes secs, soit 104 €/ha en 2023 », fait savoir Colombe Decerisy. La lentille étant fixatrice d’azote, Vincent Brygo a aussi pu bénéficier de deux points d’écorégimes Pac.