Irriguer les espèces fourragères est encore peu répandu, mais pourrait se développer avec le dérèglement climatique. Pour préparer l’avenir, Arvalis a étudié la réponse à l’eau de la luzerne, du ray-grass hybride, du ray-grass anglais et de la fétuque élevée, sur les stations de Pusignan (Rhône), La Jaillière (Loire-Atlantique) et du Magneraud (Charente-Maritime).

Efficience hydrique

Après trois ans dans des conditions météo variées (2022, 2023 et 2024), les essais ont montré qu’irriguer augmente le rendement, mais ces gains sont variables. « On a vu pour la luzerne, comme pour la fétuque, que l’efficience de l’irrigation est différente selon les coupes et les lieux », résume Sophie Gendre, ingénieure en recherche et développement dans la gestion quantitative de l’eau chez Arvalis. Le ray-grass hybride, présent à Pusignan, a dû être réimplanté tous les ans. « C’est une information en soi : il ne résiste pas au stress thermique », précise Sophie Gendre.

Quant au ray-grass anglais (RGA), la valeur médiane de son efficience hydrique est la plus importante des fourragères étudiées : 29 kgMS/ha/mm. C’est-à-dire qu’en apportant 1 mm d’eau on produit 29 kgMS/ha en plus par rapport à une situation sans irrigation. Une donnée à prendre avec du recul, car le RGA était uniquement cultivé à La Jaillière. « Nous avons été surpris de ce si bon résultat, ajoute Sophie Gendre. C’est à confirmer. » Pour les autres espèces, les chiffres sont plus consolidés : 22 kgMS/ha/mm pour la luzerne, 19 kgMS/ha/mm pour le ray-grass hybride et 18 kgMS/ha/mm pour la fétuque.

Pas d’impact sur la valeur alimentaire

En ce qui concerne la valeur alimentaire des fourrages, au global il n’y a pas d’impact de la modalité irrigation, que ce soit sur la matière azotée totale, les unités fourragères laitières ou l’indice de nutrition azotée.

Alors, faut-il irriguer ? Grâce aux valeurs d’efficience calculées précédemment, l’impact économique d’apporter de l’eau à 5 ha de fourrages (luzerne, fétuque, RGA ou RGH) a pu être simulé. La situation a été appliquée à une ferme type des Pays de la Loire, avec 125 ha de SAU dont 60 ha irrigables, et équipée de deux enrouleurs. L’idée étant pour l’agriculteur de gagner 500 kg MS/ha, avec deux cas de figure : l’irrigation des 5 ha vient en plus de celles des cultures habituelles, ou il s’agit une réallocation d’une part de l’eau assignée au maïs fourrage.

Bilan : pas ou peu de différences de charges entre les différents fourrages, sauf pour le RGA, qui profite mieux de l’eau dans les essais. Il n’y a pas non plus de différence entre les deux scénarios (ajout ou réallocation des volumes d’eau).