Les manifestants contestent une décision du tribunal administratif de Montpellier du 29 novembre 2022 qui revoit à la baisse la possibilité de prélèvements d'eau dans le fleuve de la Têt, le plus long des Pyrénées-Orientales, notamment pour l'irrigation des cultures. Venus avec une cinquantaine de tracteurs, les manifestants (environ 1000, selon les organisateurs; 500, selon la police) ont défilé derrière une banderole portant le slogan "Eau secours: la ruralité sacrifiée", jusqu'à la préfecture où une délégation a été reçue. Selon Météo-France, 2022 a été l'année la plus sèche dans les Pyrénées-Orientales depuis 1959, date du début du calcul de l'indicateur départemental.

"Sans aucune visibilité, c'est l'inquiétude"

Plusieurs élus étaient présents avec les manifestants près de la préfecture, notamment le maire RN de Perpignan, Louis Aliot, ou la présidente PS du département des Pyrénées-Orientales, Hermeline Malherbe. "Les premiers écologistes, c'est ceux qui travaillent dans la ruralité, c'est vous, a-t-elle lancé. Si l'eau ne va pas dans les canaux, les nappes ne se rechargent pas. On nous impose des choses qui sont incohérentes même du point de vue écologique." Une délégation d'agriculteurs, d'élus et des professionnels des stations de ski a été reçue par le préfet à la mi-journée. "On sort sans de vraies réponses", a regretté Pierre Hylari, président de Jeunes agriculteurs du département à l'issue de cette réunion. Sans aucune visibilité, c'est l'inquiétude."

Le tribunal administratif, saisi par l'association France Nature Environnement, a décidé de relever le seuil au-dessus duquel les prélèvements d'eau sont possibles dans la Têt. Alors qu'ils étaient auparavant possibles l'été lorsque le cours d'eau atteignait un débit de 600 litres par seconde, le seuil est passé à 1500 l/s afin de préserver la biodiversité dans la rivière, a décidé le tribunal. "Cette hausse du débit réservé, elle a des conséquences directes sur toute l'économie puisque ça va de la montagne jusqu'au littoral", dénonce Pierre Hylari. Cela concerne "la moitié des exploitants agricoles du département, soit 1500 personnes qui font majoritairement de l'arboriculture et du maraîchage."

Des représentants des stations de ski du département étaient également présents car elles utilisent l'eau du lac de barrage des Bouillouses à la source de la Têt pour alimenter leurs canons à neige, et craignent de ne plus pouvoir le faire. Jacques Alvarez, directeur de la station Font-Romeu Pyrénées 2000, qui a participé à la réunion en préfecture, a salué "la bonne écoute du préfet et de ses services". Le préfet s'est montré "attentif sur les questions d'emploi et s'est dit prêt à trouver les meilleures options pour nous aider à vivre et travailler sur nos territoires", a souligné Jacques Alvarez, rappelant que les stations du département représentaient "environ 3000 emplois directs et indirects".

L'État a jusqu'au 30 janvier pour faire appel du jugement du tribunal administratif. La préfecture a rappelé mardi qu'il n'est pas envisagé de mettre fin aux mesures de restriction d'usage de l'eau, en vigueur depuis juin, "au vu de la situation extrêmement préoccupante de l'état des ressources".