Installé depuis 1985 en entreprise individuelle à Berzème (Ardèche) sur une exploitation de 144 hectares, avec des ovins et des bovins allaitants, Bernard Cholvy s’apprêtait à réduire la voilure pour simplifier sa fin de carrière. Il pensait ne conserver qu’une seule des deux productions. Mais l’installation de sa fille Candice en 2021, après s’être orientée et avoir travaillé pendant dix années dans l’hôtellerie-restauration, a changé la donne.

Un nouvel atelier pour s'installer

Cette année-là, Candice et Bernard Cholvy ont créé le Gaec de Chancolant. L’exploitation étant trop petite pour deux, et le foncier une perle rare dans la région, ils réfléchissent à la création d’un atelier supplémentaire peu gourmand en terrain et en adéquation avec leur pratique du pastoralisme.

Après avoir imaginé un élevage de porc plein air avec transformation et vente directe, père et fille s'accordent finalement sur un élevage de poules pondeuses plein air en agriculture biologique, moins chronophage. « Même si l’investissement de départ faisait un peu peur, car on n’est pas loin du million d’euros pour la construction du bâtiment », expose Candice.

Commencé en mars 2022, le chantier du poulailler s’est achevé dans les temps pour accueillir 12 000 poulettes le 6 décembre 2022. « Nous avons choisi un modèle en intégration totale auprès des Fermiers du Sud Est », explique l’agricultrice. Le contrat de 15 ans signé avec l’intégrateur a le mérite de sécuriser leur production le temps de rembourser l’emprunt du bâtiment.

Après quatorze mois de production, le premier vide sanitaire du poulailler a eu lieu au mois de février 2024. (©  Clémentine Vignon)

Avec 139 000 € de chiffre d’affaires en 2023, l’atelier poules pondeuses a rempli dès la première année les objectifs de Candice fixés à 140 000 €. « En 2023, nous étions sur 12 mois complets de production. Ça ne sera pas le cas les années suivantes en raison du vide sanitaire qui a lieu tous les 14 mois », tempère-t-elle.

Sur le parcours de 5 hectares des poules, Candice réfléchit à installer des ombrières solaires dont la production d’énergie solaire permettrait de dégager une rémunération complémentaire. Ces ombrières présenteraient l’autre avantage de servir de support pour tendre des filets de protection afin de déjouer les attaques de buses qui tuent chaque jour entre trois et quatre poules.

Nouvelle bergerie

L’année de l’installation de Candice a aussi été marquée par la construction d’une nouvelle bergerie, dont la toiture a été dotée de panneaux photovoltaïques d’une puissance de 100 kWc. La vente d’électricité rapporte aux exploitants entre 14 000 et 15 000 euros par an, ce qui couvre leur emprunt.

Pour protéger le troupeau des loups, les éleveurs ont accueilli deux jeunes patous en août 2023. Leur dressage s’avère plus compliqué que prévu. (©  Clémentine Vignon)

« L’avantage d’avoir une bergerie plus vaste et moderne est aussi de pouvoir y confiner plus facilement les brebis et agneaux, comme en ce moment », explique Candice. Depuis que des élevages voisins se sont fait attaquer par le loup, en décembre dernier, elle confie avoir « les chocottes », au point de ne plus oser sortir les animaux. Présent en Ardèche depuis 2014, le loup a fait son apparition dans leur secteur il y a deux ans.

Les deux patous qu’ils ont accueillis sur l’exploitation en août dernier, sont encore trop jeunes pour défendre le troupeau. Des patous plus vieux, déjà aptes à travailler et plus calmes, auraient mieux convenu aux éleveurs qui déplorent de ne pas en avoir trouvé. « Nos patous sont trop fougueux, ils effraient les brebis ! », soupire Candice, pour qui le dressage des chiens s’avère plus compliqué que prévu.

Trois ans après son installation, Candice Cholvy  ne regrette absolument pas son choix de reconversion. Le partage des tâches avec son père s’est fait naturellement, et les deux associés ont atteint un équilibre. Depuis mars 2023, ils se rémunèrent chacun 1 200 € nets par mois. Ils souhaitent désormais limiter les investissements pour se concentrer sur les productions existantes, poursuivre la transmission et anticiper au mieux le départ à la retraite de Bernard dans trois ans.