Les premières résistances des ravageurs du colza aux insecticides sont apparues dès la fin des années quatre-vingt-dix, notamment sur pucerons verts. À partir de 2014-2015, la résistance de l’altise d’hiver et du charançon du bourgeon terminal aux pyréthrinoïdes a ensuite été identifiée. « Pour tous ces ravageurs-là, cela se traduit aujourd’hui par une perte d’efficacité au champ avec, pour un certain nombre d’entre eux, des pyréthrinoïdes devenus complètement inefficaces », a indiqué lors d’un webinaire au début de juin 2025, Céline Robert, chargée d’études chez Terres Inovia.

En parallèle, compte tenu du changement climatique, des sécheresses sont de plus en plus souvent observées au moment de l’implantation de la crucifère, ce qui accroît sa sensibilité aux attaques de ravageurs à l’automne. Ces derniers — principalement la grosse altise et le charançon du bourgeon terminal — sont aussi davantage présents ces dernières campagnes.
La gestion de ces petites bêtes est par ailleurs rendue plus compliquée par la disparition de substances actives. « Depuis le retrait du phosmet au début de 2023, les pyréthrinoïdes demeurent les seuls insecticides homologués pour lutter contre les coléoptères sur colza. Or, ils sont totalement inefficaces sur les populations d’altises avec un haut niveau de mutation SKDR (1) », a martelé Laurent Ruck, ingénieur de développement responsable insecticides et biocontrôle chez Terres Inovia.

Insecticides en dernier recours
Si l’objectif est de maintenir le monitoring sur les résistances dans les années à venir, il est dès lors essentiel de combiner tous les leviers de lutte disponibles. Il faut notamment tout mettre en œuvre pour obtenir un colza robuste : qualité et date d’implantation, choix variétal, plantes compagnes, fertilisation azotée, plantes pièges, encourager la présence d’auxiliaires, etc. Terres Inovia insiste : l’emploi d’insecticides se fera en dernier recours. Pour aider les agriculteurs, l’institut a d’ailleurs mis au point des outils d’aide à la décision (OAD) qui prédisent les vols de ravageurs ou évaluent le risque, tout en prenant en compte la pression, le contexte agronomique et la robustesse de la culture.
Contre les altises adultes (jusqu’à 3-4 feuilles) présentant la mutation SKDR, il n’existe pas d’alternative insecticide. Sur larves d’altises, les pyréthrinoïdes étant inefficaces en secteur SKDR, notamment sur le nord-est du territoire, Minecto Gold (lire l'encadré) demeure la seule solution. En secteur KDR, c’est-à-dire quasiment sur toutes les autres zones, elles restent efficaces.
En zone SKDR, « la stratégie Karaté Zéon à 0,075 l/ha à la fin d'octobre suivi de Minecto Gold au début de novembre permet de lutter contre les larves d’altises et le charançon du bourgeon terminal », précise le spécialiste.
Il indique que des essais sont en cours pour évaluer l’efficacité d’une seule application bien positionnée de Minecto Gold pour contrer ces deux ravageurs. En effet, sur ce charançon, les pyréthrinoïdes appliquées à la fin d'octobre sont en moyenne efficaces à 45 %, mais il y a un léger avantage de Minecto Gold (55 %).
(1) Deux principaux mécanismes existent : la mutation de cible KDR et la super--KDR (ou SKDR), qui présente un niveau de résistance plus élevé.