« Je n’avais encore jamais passé un insecticide sur des repousses de colza… Je me suis senti tellement inutile à faire ça. » Dans la Seine-et-Marne, c’est la consternation pour cet agriculteur de 32 ans qui souhaite rester anonyme et qui s’est vu contraint, à la demande de sa commune, de traiter avec un insecticide une surface d’environ 25 ha de repousses de colza. « C’est aberrant, mais on est tellement mal vu en ce moment. J’ai envie d’être bien avec ma commune et avec mes voisins. Alors je l’ai fait, même si c’est complètement fou. »
Non au glyphosate, mais oui à l’insecticide
La mairie avait dans un premier temps contacté l’exploitant à la suite de plainte d’habitants. « Il y a une vingtaine de maisons autour de ce champ, et j’ignore qui, mais quelqu’un s’est plaint des insectes. J’habite aussi par ici, et je n’ai rien constaté. » Pour montrer sa bonne volonté, l’agriculteur a commencé par « passer le déchaumeur » devant les maisons.
« On a eu envie d’arranger la situation », assure-t-il. Mais ça n’a pas suffi. « Et c’est à ce moment-là qu’on m’a demandé de traiter mon champ avec un insecticide qui m’a été payé, poursuit-il. Ce qui est certain, c’est que je n’aurai pas mis un centime pour cela. On marche tellement sur la tête. »
L’exploitant l’a pulvérisé un midi, afin que tous puissent observer qu’il avait en effet rempli son devoir. « Je ne comprends pas. On nous casse les pieds pour le glyphosate, mais c’est moins dangereux qu’un insecticide. C’est choquant. » L’agriculteur ne sait pas précisément qui a payé le produit, « probablement le contribuable », suggère-t-il.
Des ventilateurs géants face aux pics de pollution ?
Il a fait une photo sur le moment, diffusée sur son compte Facebook. Sous sa publication, il interpelle les « campagnards en cravate ». « Ils ne peuvent pas être des personnes de la campagne, poursuit-il. Ceux-là savent qu’il y a des insectes en tout genre, que c’est normal. Ils l’ont idéalisée, et au final ils ne sont pas heureux. C’est comme la personne qui a porté plainte pour un chant de coq ou l’autre pour les sons de cloche des vaches. Il serait peut-être mieux pour eux de vivre en ville. Seulement, en ville, il y a des pics de pollution, et ils ne peuvent pas demander à la mairie de sortir des ventilateurs géants pour les repousser. Je crois qu’on en est là à la campagne. »