« En bio, il faut investir dans des outils adaptés pour travailler le sol au pied des arbres afin de supprimer les herbicides, si ce n'est pas déjà fait en conventionnel », note Myriam Codini, de la chambre d'agriculture des Pyrénées-Orientales. Il est également utile d'implanter des bandes fleuries pour héberger des auxiliaires. « Les intrants reviennent plus cher, que ce soit les engrais organiques ou les produits de biocontrôle », relève Valérie Gallia, de SudExpé à Saint-Gilles dans le Gard.

Les temps de travaux, par contre, restent proches. « En bio, il y a plus de passages pour le travail du sol ou les traitements, renouvellés fréquemment avec des produits de contact, mais moins d'heures de taille, d'éclaircissage et de récolte du fait d'une moindre vigueur et de rendements plus bas », précise Myriam Codini.

Forte chute de rendement

« Cette baisse de vigueur est dûe à une moindre efficacité des engrais organiques, qui ne minéralisent pas toujours au moment où les arbres en ont besoin », note Valérie Gallia. La pression des bio-agresseurs peut également affaiblir les arbres. La perte de rendement commercialisable, variable en fonction des variétés et des circuits de vente, se situe entre 25 et 50 %. Les maladies de conservation ne sont pas faciles à maîtriser. « Pour limiter les risques, il vaut mieux resserrer le calendrier en abandonnant les variétés tardives », conseille-t-elle. Lorsque le climat est humide, il y a malgré tout des problèmes de conservation avec des variétés de saison. « En bio, il y a plus d'écarts de tri, ce qui réduit d'autant le volume commercialisé », note-t-elle. C'est cette chute des rendements qui renchérit fortement le coût ramené au kilo. Dans l'exemple ci-contre, celui-ci est multiplié par plus de deux.

Diversifier les cultures

« En bio, les rendements en pêches et nectarines varient plus fortement d'une année à l'autre. Pour limiter les risques, il vaut mieux réduire les surfaces et introduire à la place d'autres cultures moins risquées », conseille Gérard Majoral, arboriculteur en bio à Thuir dans les Pyrénées-Orientales. Cela permet en même temps de faire un tri dans les variétés afin d'éliminer les plus sensibles aux bio-agresseurs. En introduisant d'autres productions de fruits et légumes réparties sur l'année, on allonge également le calendrier de travail, ce qui facilite la fidélisation du personnel. « Avec moins de fruits par arbre en bio, les aléas climatiques marquent plus. Si ce n'est pas déjà fait, mieux vaut protéger ses vergers du gel, et de la grêle s'ils sont dans une zone à risque », ajoute-t-il.

Des tensions sur les prix

Jusqu'à présent, les prix de vente des pêches et nectarines bio couvraient bien les coûts et fluctuaient peu, ce qui était rassurant. Mais depuis deux ans, la croissance de la demande marque une pause alors que l'offre continue à progresser, ce qui crée des tensions sur les prix. « Les acheteurs deviennent plus exigents et n'hésitent pas à renvoyer des lots », constate Gérard Majoral, président de la Sica Nat & Bio, une organisation de producteurs. Cette évolution concerne aussi bien les grandes et moyennes surfaces que les magasins bio spécialisés, confrontés à un recul de leurs ventes.

Mieux communiquer avec les consommateurs

En circuit court, la demande pour les fruits locaux se maintient mieux, mais concerne des volumes limités. « En circuit long, le label AB ne suffit pas pour vendre. Mieux vaut s'appuyer sur une organisation collective solide », note Gérard Majoral. Il faut également trouver des solutions pour réduire les coûts, à la production comme au conditionnement, et mieux communiquer avec les consommateurs. « Nous devons revenir à leur contact dans les magasins bio, leur expliquer nos méthodes et nos coûts, et rappeler que nos fruits ont une identité, un terroir », affirme-t-il.