Comment la propagation de la FCO 3, de la FCO 8 et de la MHE a été gérée par les États membres de l’Union Européenne en 2024 ?
« La situation sanitaire dans l’Union Européenne [UE] est très hétérogène et l’attitude est différente entre les États membres infectés eux-mêmes. Les dispositifs mis en place varient en termes de surveillance, vaccination obligatoire, prise en charge des doses… Nous connaissons peu ces maladies et nous n’avons pas beaucoup de recul. La variété d’impacts possibles rend la gestion des épizooties très complexe. De plus, une maladie n’aura pas les mêmes conséquences si elle arrive tôt dans la période de virémie – comprise entre juin et décembre. Des dispositions réglementaires existent et ne sont pas toujours adaptées au sérotype auquel on a affaire. Pour les différents sérotypes de la fièvre catarrhale ovine (FCO) et la maladie hémorragique épizootique (MHE), le pragmatisme a pris le dessus avec des systèmes de dérogation. Les États membres ont ainsi négocié avec leurs clients principaux pour ce qui concerne la circulation des animaux. »

Est-ce qu’une harmonisation à l’échelle européenne de ces méthodes de gestion est envisagée ?
« La FCO et la MHE sont classées au niveau européen dans les catégories C et D respectivement, tandis que la commission européenne n’intervient que sur les maladies de catégorie A et B. Ainsi, malgré des contraintes extrêmement fortes sur les mouvements des animaux, les États membres ont la latitude de présenter un programme d’éradication ou de négocier des dérogations concernant le commerce des animaux. Or, la commission utilise ces accords réglementaires de gré à gré comme un argument pour ne pas intervenir au niveau communautaire en termes de financements. Puisque les négociations sont bilatérales, cela justifie qu’un soutien financier ne puisse pas être attribué à l’échelle européenne globale. »
La réglementation nécessite-t-elle alors d’être modifiée ?
« Une simplification administrative est absolument nécessaire, afin de permettre une certaine flexibilité de la réglementation. Si une maladie frappe fort, il faut évidemment pouvoir réagir, et à l’inverse, si les restrictions sont trop contraignantes, il faut pouvoir modifier très rapidement les conditions afin de limiter l’impact sur le commerce. Jusqu’ici, les autorisation temporaires d’utilisation (ATU) des vaccins sont distribuées par pays. La logique voudrait qu’elles soient attribuées dans tous les États membres. Ces autorisations sont moins exigeantes en termes d’efficacité qu’une validation officielle de mise sur le marché d’un vaccin. Mais c’est toujours mieux que rien lorsque la maladie avance rapidement et que ces démarches administratives ralentissent la mise en place des mesures sanitaires. Il est également nécessaire de questionner la pertinence du zonage de 150 kilomètres, qui n’est pas suffisant selon les experts en virologie. Les animaux en provenance du foyer infecté peuvent tout de même circuler dans la zone. Or, augmenter la zone régulée tout en appliquant davantage de contraintes sur le foyer infecté serait une stratégie plus efficace pour réduire la propagation d’une maladie. »
Quelles sont les attentes envers la commission européenne ?
« Il y a un réel besoin de coordination. L’idée est d’offrir de la visibilité et de pouvoir anticiper les conditions à mettre en place lorsqu’une maladie arrive sur un territoire. La commission devrait proposer un outil d’aide à la décision qui permette, en étant capable de mesurer rapidement l’impact d’un nouveau sérotype, d’ajuster les mesures de lutte et de contrainte aux mouvements. L’objectif serait d’objectiver les conséquences de la maladie selon des critères claires, afin d’obtenir une analyse rapide du risque, et d’adapter les décisions règlementaires. Pour ce qui concerne la vaccination, bien qu’elle reste la stratégie la plus efficace pour maîtriser une épizootie, elle reste complexe à mettre en place. La banque d’antigènes n’est pas une solution miracle. On ne peut pas stocker à très grands frais tous les sérotypes susceptibles d’arriver en Europe. En revanche, la commission a pour rôle de financer la recherche et la surveillance afin de prioriser ce contre quoi nous devons nous protéger. »