À la fin de juillet, les bêtes étaient superbes. « Au début d'août, comme presque tous les éleveurs ovins de la Drôme, j’ai vu mes brebis s’isoler, ne plus manger et mourir, relate Vincent Delmas. Quand on a compris ce qui se passait, c’était trop tard. » La fièvre catarrhale ovine de sérotype 8 (FCO-8) lui a ravi 40 % de son cheptel allaitant de 50 mères.

« Entre les frais vétérinaires, les agnelles rachetées et celles gardées au lieu d’être vendues, j’ai perdu 5 000 €. Heureusement, j’ai aussi du maraîchage. Les éleveurs les plus touchés ont du mal à en parler. Certains veulent arrêter, dégoûtés d’observer leur troupeau moche et titubant malgré le savoir-faire acquis depuis des décennies. »

« Cela pèse aussi sur nos familles, ajoute Nicolas Champurney, éleveur ovin bio en Isère. Quand la maladie arrive, on n’en voit pas le bout. Pendant six à huit semaines, malgré tous nos soins, on ramasse des cadavres chaque matin. » Chez lui, c’est la laine transformée l’an dernier qui sauvera la saison. Il n’a plus de bêtes à vendre jusqu’en mars.

Sur 244 animaux, 84 sont morts. La moitié était destinée à la viande, l’autre à la reproduction. « Au lieu de 130 mères, il me reste 88 femelles, dont 52 aptes à la lutte. J’ai perdu mes trois béliers dont l’un à 600 € qui n’a même pas lutté. » Son chiffre d’affaires sera amputé d’au moins 30 000 €, sans parler de pertes de fécondité.

Des pertes indirectes

Avec la Confédération paysanne, Nicolas, Vincent et des éleveurs de toute la Région Auvergne-Rhône-Alpes rencontraient Bruno Ferreirra, directeur de la direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf), le 22 novembre pour évoquer la FCO. Rendez-vous était donné sur la ferme laitière de Sébastien Magnin à Saint-Martin-en-Haut dans le Rhône, où, après le passage du virus, des brebis ne repartent pas en lactation après avoir mis bas.

« Une brebis sans lait, c’est 2 000 € de perte sur l’année, indique Sylvain Morel, éleveur également. Et des brebis rentrées en bergerie en septembre pour se protéger du moucheron, c’est 2 000 € d’achat de foin. » « Ces pertes indirectes n’étaient pas bien prises en compte pour l’indemnisation, nous allons le faire remonter », reconnaît le directeur de la Draaf, partant pour « travailler à une organisation collective afin d’être mieux armés face aux épidémies ».

Car au-delà du sujet des indemnisations, les éleveurs pointent le « cafouillage » dans lequel le virus a frappé leurs élevages. « On aurait dû mieux connaître cette maladie arrivée il y a quinze ans, insiste le porte-parole Xavier Fromont. Et avoir des messages clairs autour des vaccins. »

Sur le plan national, le syndicat réclame une enveloppe de 500 millions d'euros pour l’indemnisation des pertes et la vaccination contre les FCO et la MHE, dont 55 millions d'euros affectés à la recherche sur ces maladies.