« L’atteinte des objectifs fixés par la Commission européenne pour la future Pac 2021-2027 doit passer essentiellement par la bioéconomie, l’innovation et l’étiquetage des produits », a assuré Pierre Dupraz, directeur de recherche à l’Inrae Bretagne Normandie lors d’une conférence en ligne le 16 septembre 2020. Parmi les objectifs en faveur du climat, « le moindre recours aux pesticides ne doit pas se traduire par une baisse de la production européenne au profit des importations. Cela ne générerait aucun gain climatique. »

 

À lire aussi :Réchauffement climatique, Bruxelles veut une agriculture neutre en carbone dès 2035 (17/09/2020)

 

Séquestrer du carbone

Pour l’Inrae, la baisse de la production européenne doit nécessairement être accompagnée d’une baisse de la consommation de la population. « Les émissions générées par les exportations européennes sont comptabilisées dans l’inventaire des gaz à effet de serre (GES) de l’Union européenne, ce qui n’est pas le cas des importations de soja et autres protéines végétales auxquelles sont également associées des émissions de GES, note Pierre Dupraz. Si la production européenne baisse plus vite que notre consommation, ce qu’on ne produira plus sera probablement produit par d’autres et pas forcément dans des conditions de performance climatique aussi bonnes. »

 

Deux autres solutions « à technologies constantes » se dégagent : réduire les inefficacités climatiques de l’élevage et séquestrer beaucoup plus de carbone. En France par exemple, « le stockage de carbone supplémentaire pourrait atteindre 41 % des émissions de GES agricoles de 2016 et plus de 30 % à un coût inférieur de 100 € la tonne équivalent CO2 pour toutes les terres agricoles et forestières, et principalement pour les terres arables. En effet, les terres arables, où les stocks actuels sont les plus faibles, présentent le plus grand potentiel de stockage supplémentaire avec 86 % au total », appuie Pierre Dupraz.

Une nécessaire coordination européenne

Ainsi, des améliorations sont possibles mais nécessitent une meilleure coordination européenne. En lien avec les propositions législatives de juin 2018 portant sur la future Pac, si des indicateurs des plans stratégiques des États membres ont été définis pour le suivi de leur performance climatique, « aucun ne concerne les GES », fait savoir Pierre Dupraz. « Jusqu’à présent, aucun objectif de réduction du méthane n’a été acté », ajoute-t-il.

 

Plus largement, « la Commission européenne souhaite que 40 % des aides soient consacrées au climat, sans qu’il s’agisse pour autant d’une contrainte réglementaire pour les plans stratégiques des États membres. Les conditions entre les paiements et les sanctions sont très mal corrélées aux effets climatiques », estime l’expert de l’Inrae.