L’histoire

André avait été engagé par une entreprise de production maraîchère en qualité de salarié agricole au terme d’un contrat signé le 31 mai 2010. Quelques années après, il avait exercé les fonctions de responsable commercial.

Ayant souhaité opérer une reconversion professionnelle, André avait signé avec le directeur de l’exploitation, le 20 novembre 2018, une convention de rupture. Leur relation de travail avait pris fin le 31 décembre suivant. André avait, alors, avec deux anciens salariés, créé une exploitation agricole dans le même secteur d’activité que celui exercé par l’entreprise à laquelle il avait appartenu.

Le contentieux

Estimant avoir été trompé par André qui avait dissimulé son projet de création d’entreprise, le directeur de l’entreprise maraîchère avait saisi le conseil des prud’hommes en nullité de la convention de rupture et en remboursement de l’indemnité spécifique versée à ce titre et de l’indemnité de préavis.

André avait-il intentionnellement cherché à tromper son employeur ? L’article 1137 du code civil, invoqué par la société, précise que constitue un dol (des manœuvres frauduleuses destinées à tromper) la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. Or, en la cause, la société maraîchère n’avait-elle pas accepté la signature de la convention de rupture en se fondant sur le projet de reconversion professionnelle invoqué par André qui avait dissimulé son projet de création d’une entreprise concurrente ?

André s’était défendu. Aucune réticence dolosive ne peut être imputée à une partie sur laquelle ne pesait aucune obligation d’informer son cocontractant. Or, en l’absence de clause de non-concurrence insérée dans son contrat de travail, il n’était pas tenu de révéler spontanément à son employeur son projet de création d’une activité concurrente, selon lui.

Mais les juges n’avaient pas suivi André. La société maraîchère s’était bien déterminée au regard du seul souhait de reconversion professionnelle invoqué par André. Et il était constant que ce dernier avait volontairement dissimulé des éléments dont il connaissait le caractère déterminant pour l’employeur afin d’obtenir le consentement de ce dernier à la rupture conventionnelle. Aussi, pour les juges, le consentement de la société avait bien été vicié. Cette convention devait être annulée. Et dans la mesure où le contrat de travail avait été rompu en exécution d’une convention de rupture ensuite annulée en raison d’un vice du consentement de l’employeur, la rupture produisait les effets d’une démission. André devait dès lors rembourser à la société les indemnités reçues. Saisie par André, la Cour de cassation a confirmé cette solution.

L’épilogue

André aurait pu obtenir des indemnités qu’il n’aurait pas perçu en cas de démission. En retenant que le départ d’André devait être assimilé à une démission, les juges l’ont privé des avantages procurés par la rupture conventionnelle.