Pourquoi la robotisation séduit-elle ?

La robotisation porte beaucoup d’espoir pour améliorer le travail agricole. Les exploitations maraîchères, particulièrement celles conduites en agriculture biologique, se caractérisent par un grand nombre d’espèces cultivées sur des petites surfaces. C’est un premier frein à la mécanisation auquel il faut ajouter le fait qu’il existe peu d’outils polyvalents et qu’ils sont coûteux quand ils existent. Résultat : le désherbage manuel reste aujourd’hui très important. On considère qu’il représente plus du tiers du temps de travail d’un maraîcher. Et cela a des conséquences puisque neuf maraîchers sur dix souffrent de troubles musculosquelettiques. Dans ce contexte, la robotique est une piste pour réduire la pénibilité et le temps de travail.

Quels gains sur la pénibilité faut-il attendre d’un robot ?

À la station expérimentale d’Auray (1), nous utilisons depuis 2014 le robot Oz de Naïo Technologies. Nous nous sommes filmés, avec et sans le robot, sur plusieurs opérations liées notamment à la culture de la tomate (binage, effeuillage, palissage, récolte, etc.). L’analyse des vidéos a mis en évidence l’importance des transferts de pénibilité.

En clair ce que l’on gagne avec le robot sur une partie du corps, on le perd sur une autre. Dans un chantier de plantation, il y a, par exemple, un gain au niveau du dos mais une perte au niveau des épaules. Toutes les opérations culturales, à l’exception du binage, sont concernées par ces transferts.

L’autre constat important est que le robot diminue la proportion de temps passé dans les postures les plus contraignantes. Ça, c’est quelque chose de fondamental ! On peut aussi ajouter le fait que le robot est silencieux et qu’il n’émet pas de gaz d’échappement. C’est un plus en termes de confort au travail.

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Le robot crée-t-il de nouvelles formes de pénibilité ?

Confier ses cultures à un robot change la façon de faire et demande un effort d’adaptation. L’utilisateur peut facilement être accaparé par ce que fait l’outil. Quand celui-ci marche bien, il n’y a pas de souci particulier, mais dans le cas contraire, on voit que l’utilisateur n’est pas rassuré. La charge mentale est réelle mais très difficile à évaluer. C’est pourquoi nous avons engagé un travail sur ce sujet avec la MSA des Portes de Bretagne.

Un robot qui coûte entre 20 000 et 25 000 euros est-il rentable ?

Pour répondre à cette question, il faut d’abord chiffrer les gains apportés par le robot en termes de pénibilité et d’amélioration des postures. Avec la MSA, nous préparons des simulations qui prennent en compte, sur toute la durée de vie d’un maraîcher, l’impact des troubles musculosquelettiques, des accidents et des arrêts de travail. On ne peut pas aborder la rentabilité du robot sous le seul angle du temps de travail. Nous l’avons constaté à Auray, il met parfois moins de temps que l’homme, mais il peut aussi en mettre autant, voire plus.

Propos recueillis par Anne Mabire

(1) La station expérimentale en maraîchage Bretagne sud à Auray (Morbihan) dépend de la chambre d’agriculture du Bretagne.