Dans les élevages porcins et avicoles, il existe deux risques de pollution des salariés par l’air ambiant : l’ammoniac et les produits chimiques. Réalisatrice d’une étude sur ces risques pour la chambre d’agriculture de la Bretagne, Caroline Depoudent donne les clés pour protéger les salariés.

A priori, les salariés des élevages de porcs et de volailles ne sont pas dramatiquement exposés au risque chimique ou aux émanations de poussières. Une étude de la chambre d’agriculture de la Bretagne montre que l’exposition à l’ammoniac, aux poussières ou aux produits chimiques est inférieure aux valeurs limites (8 heures à 10 ppm ou 15 minutes à 20 ppm pour l’ammoniac par exemple).

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Une exposition différente selon les travaux

Toutefois, il existe une certaine disparité dans les situations : l’exposition diffère selon les élevages et selon les travaux effectués. Par exemple, lors du tri des porcs charcutiers, la moyenne d’exposition est de 14 ppm mais les valeurs extrêmes, constatées sur le terrain, peuvent dépasser les 20 ppm. L’alimentation des porcelets, qui demande souvent à s’approcher du sol, présente une exposition moyenne de 9 ppm qui peut être plus élevée selon les cas.

Pour les volailles, la chambre d’agriculture de la Bretagne a identifié les travaux les plus exposés aux émanations d’ammoniac : les inspections de fin de bandes, le curage, le ramassage et le paillage. Les salariés sont aussi exposés aux poussières qui proviennent des animaux ou des aliments, des fragments de litière ou des murs.

Les mesures montrent que l’exposition des salariés est largement en dessous des valeurs limites de la réglementation du travail. Toutefois, sur le terrain, des salariés relatent des symptômes comme une irritation du nez, des yeux ou de la gorge, des toux ou des maux de tête. Les valeurs limites de la réglementation étant valables pour les matières inertes, il est possible qu’elles ne prennent pas toutes les poussières en compte.

L’air des bâtiments d’élevage est chargé en ammoniac provenant de la décomposition des déjections animales. Elle peut irriter les muqueuses et pénétrer dans le sang. Le taux d’ammoniac dans l’air dépend du dégagement des effluents, du pH des déjections, de la température et de la vitesse de l’air qui circule dans le bâtiment.

Il est donc possible d’agir pour réduire l’exposition. Une litière fine provoque plus de poussière. De même qu’une alimentation sèche par rapport à une alimentation liquide des animaux. La densité dans les bâtiments influence aussi l’émission de poussières : les jeunes en postsevrage sont plus actifs et se frottent plus les uns les autres, ce qui émet davantage de poussière.

Cinq clés en production porcine

Pour prévenir l’émission d’ammoniac ou de poussières, l’employeur dans les élevages de porcs dispose de cinq clés pour agir :

  • Agir sur l’air ambiant : augmenter la ventilation des bâtiments, préférer une ventilation en surpression, préférer une entrée d’air par les plafonds diffuseurs ;
  • Agir sur les effluents : évacuer plus fréquemment les déjections, ajouter des additifs ou des acides dans les lisiers, envisager la lisiothermie pour diminuer la température des lisiers ;
  • Agir sur les pratiques au travail : utiliser moins d’asséchant en poudre pour soigner les porcelets et lui préférer un tapis ou des cartons au sol, moins manipuler les animaux, si c’est possible ;
  • Agir sur l’alimentation : préférer une alimentation multipare pour diminuer l’ammoniac dans les lisiers, ajouter de l’acide benzoïque, ajouter un produit gras dans les granulés pour qu’ils provoquent moins de poussière ;
  • Agir sur l’ambiance du bâtiment : trouver le bon couplage entre le chauffage et la ventilation, assurer la brumisation de l’air et pulvériser de l’eau et de l’huile (attention au dosage pour éviter les glissades des salariés), envisager la technique de l’ionisation électrostatique qui plaque les particules aux murs et évite leur suspension dans l’air ambiant.

Trois leviers d’action pour les volailles

En élevage de volailles, il est aussi possible de réduire les risques respiratoires en agissant à plusieurs moments, et en particulier durant les travaux les plus risqués :

  • Agir en présence des animaux : bien gérer la litière (choix du matériau, fréquence de renouvellement, limitation de son humidification), ventiler, utiliser des additifs contre l’émission d’ammoniac, limiter l’agitation des animaux ;
  • Agir durant le ramassage des animaux : limiter l’agitation des animaux le plus possible, mécaniser le ramassage ;
  • Agir pendant le curage ou le paillage du bâtiment : mécaniser le plus possible ce poste de travail, préférer un tracteur à cabine pour rentrer dans le bâtiment, vérifier que la mise en route de la ventilation à ce moment-là ne soulève pas la poussière.
Éric Young