Jordan Bardella est venu à la rencontre d’agriculteurs du Lot-et-Garonne ce 10 novembre 2024. En janvier déjà, sentant monter un « mouvement de colère » du monde paysan, il s’était rendu sur une exploitation agricole. C’était sur des terres viticoles dans le Médoc (Gironde) pour dénoncer « l’Europe de Macron qui veut la mort » de l’agriculture française.
Visite dans une exploitation céréalière du Lot-et-Garonne
Ce dimanche, le président du Rassemblement national a visité une exploitation céréalière à Virazeil. « Nous tirons le signal d’alarme depuis plusieurs semaines, aucun des problèmes des agriculteurs n’a été traité depuis leurs précédentes mobilisations », a affirmé Jordan Bardella.
« Le pronostic vital de l’agriculture française est aujourd’hui engagé, a-t-il insisté. Si nous ne prenons pas dès maintenant des mesures protectionnistes pour mettre notre agriculture à l’abri de la concurrence internationale déloyale, notre agriculture ne survivra pas. »
Dans ce département, les agriculteurs ont longtemps été hermétiques à l’extrême droite. Après avoir élu en 1920 le premier député communiste de France, le Lot-et-Garonne est resté un bastion du vote paysan de gauche. Aux dernières législatives, avec trois candidats en tête au premier tour, le RN n’a finalement récolté qu’un siège.
L’accord avec le Mercosur en toile de fond
Quelques mois après les manifestations des agriculteurs, les syndicats majoritaires ont appelé à une nouvelle mobilisation nationale à partir de la mi-novembre. Des rumeurs sur les négociations d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur sud-américain ont mis le feu aux poudres.
Jordan Bardella a appelé Emmanuel Macron à mettre « en échec » cet accord, affirmant que « la colère agricole n’est pas une fatalité », mais « la conséquence de choix politiques ». La ministre de l’Agriculture Annie Genevard a déclaré à la fin d'octobre que la France ne « voulait pas » de cet accord avec le Mercosur. Et elle a assuré ce 10 novembre qu’il ne serait pas signé lors du prochain G20.
Ces négociations pourraient « aboutir à un accord commercial avec le Brésil, qui viendrait submerger notre marché avec des produits ne respectant aucunement les normes que l’on impose aux agriculteurs français et foudroyer une partie de nos filières », a lancé Jordan Bardella, accueilli par une trentaine de membres de la Coordination rurale.
« On l’avait annoncé, lui a expliqué un agriculteur, en parlant des prochaines manifestations. On a reporté […], mais là, on ne reportera plus. Le 19 novembre, on partira manifester et on ne sait pas quand on s’arrêtera. » Et la personne à ses côtés d’ajouter : « On n’a beaucoup de mal à croire à la parole politique. […] On fait partie de la solution, mais seule la méthode forte fonctionne en France, c’est [elle] qu’on s’apprête à employer, mais on se garderait bien de le faire. »
« Comme le messie »
La Coordination rurale du Lot-et-Garonne, majoritaire dans le département où elle dirige la chambre d’agriculture depuis deux décennies, avait initié en janvier un important convoi de tracteurs vers le marché d’intérêt national de Rungis. Elle a récemment appelé à une nouvelle mobilisation à partir du 19 novembre, en bloquant notamment le fret ferroviaire.
« Tu es notre dernier espoir, a lancé le président de la chambre d’agriculture et membre de la Coordination rurale, Serge Bousquet-Cassagne. On les a tous essayés. […] On a cru en Sarkozy, on a été très déçus et depuis c’est le néant total. […] On ne t’attend pas comme le messie mais pas loin.
« Bloquer tout »
Un peu plus tard, le président du RN a tenu un meeting à Tonneins. « Il a 1 000 % raison (de parler agriculture). Il faudrait que les agriculteurs montrent encore plus leur colère à ce gouvernement qui enterre ceux qui nous nourrissent. Il faut qu’ils bloquent tout, les supermarchés, les autoroutes », opine Sébastien Chaubert, 51 ans, employé dans une entreprise de fertilisants dans les Landes.
Pascal Beteille, un agriculteur de 59 ans, exprime aussi sa satisfaction : « Bardella a tout dit. Le RN est le parti le plus proche des agriculteurs. Depuis un an on n’a rien obtenu. On n’est pas entendus et ça va mal finir. »
Avec l’AFP