En 2023, dans le sud de la Vendée, il est tombé 550 mm d’eau entre le 15 octobre et le 31 décembre. « C’est autant que sur toute l’année 2022 ! » a commenté au troisième jour du Sival, Lydie Bernard, agricultrice dans ce département et vice-présidente du conseil régional des Pays de la Loire. Rapporté en table ronde, cet exemple illustre, parmi tant d’autres, un phénomène désormais bien connu des agriculteurs : l’irrégularité des pluies et de facto, une difficulté accrue à gérer les besoins des plantes.
Cultiver l’eau
En tant qu’arboriculteur, « cette problématique fait partie des deux ou trois qui m’obnubilent tout au long de l’année », a témoigné Pascal Pineau, à la tête d’un verger de 220 hectares dans le Maine-et-Loire. Troisième génération à se succéder sur l’exploitation, sa réponse est double : quantitative avec un stockage de l’eau d’hiver, et qualitative. « Depuis une dizaine d’années, nous avons réenherbé les interrangs et planté des haies, y compris à l’intérieur des îlots fruitiers. Il y a plusieurs avantages à cette technique ; en particulier, celui de rafraîchir le climat ! »
Cultiver l’eau ? Le concept a fait son apparition dans les allées du Sival 2024 où on a aussi beaucoup parlé d’hydrologie régénérative, cette science qui lie cycle de l’eau et aménagement du territoire.
Prioriser les usages pour les fruits et légumes
William Bost, pépiniériste dans le Maine-et-Loire, n’a pas d’accès garanti à l’eau : « Nous produisons 25 millions de végétaux par an pour verdir et rafraîchir les villes. Notre activité est agricole mais elle n’est pas alimentaire ; en cas de restriction, nous ne sommes pas prioritaires. »
Il y a dix ans, l’entreprise a investi 2 millions d’euros en travaux de terrassement. Désormais, elle récupère l’eau des aires de culture (25 hectares). Pour autant, « notre stockage ne représente que dix jours de consommation en été », situe William Bost.
En 1992, la loi sur l’eau a défini des priorités d’usage. Faut-il également en fixer au sein de l’agriculture ? « À la Confédération paysanne, nous pensons que “oui” », a expliqué Nicolas Fortin, son secrétaire national. Le syndicat — organisateur d’une réunion “Eau” au Sival — souhaitant un accès prioritaire pour l’arboriculture et le maraîchage ; avec un plafond par hectare et par personne.
Partir d’un besoin collectif
Producteurs de légumes et de maïs semence, Gaëtan Leblanc et ses associés scrutent toute opportunité de créer une ou des réserves. « Celles que nous avons sont alimentées par des forages ; ce n’est pas ou plus une solution satisfaisante », pointe l’agriculteur, installé dans l’est du Maine-et-Loire. Dans ce secteur, le lac de Rillé (250 hectares), créé en 1977 pour servir de réservoir aux agriculteurs situés en aval, reste « LA » référence ; un modèle. « Même en 2022, ils n’ont pas manqué d’eau ! »
Stocker ? « Oui » répond l’élue Lydie Bernard, « mais stockons par rapport à un besoin collectif et pas seulement agricole ! » C’est typiquement le cas du lac de Rillé, à la fois réservoir pour l’irrigation, base de loisirs nautiques, repère des marcheurs et réserve ornithologique.