C’est dans un climat de fortes tensions, avec de nouvelles mobilisations qui ont lieu dans plusieurs départements toute la semaine, que le Premier ministre accompagné de ses ministres de l’Économie, de l’Agriculture et de la Transition écologique a de nouveau pris la parole sur les questions agricoles. « Depuis trois semaines, des aides ont été versées, des simplifications ont été réalisées, des textes ont été publiés », a justifié Gabriel Attal.

À quelques jours de l’ouverture du Salon de l’agriculture, il a préparé le terrain pour la visite d’Emmanuel Macron, et présenté, ce 21 février 2024, un point d’étape sur l’avancée de la mise en œuvre des mesures du gouvernement pour faire face à la crise agricole.

62 engagements et « 100 % de chantiers ouverts »

Sur « 62 engagements » qui ont été pris, « 100 % des chantiers ont été ouverts » et « nous avons abouti ou nous sommes sur le point de le faire pour 8 engagements sur 10 », martèle le Premier ministre. La méthode est cadrée, 8 engagements sur 10 sont pris, cela veut dire que les mesures annoncées sont soit « faites », soit « avancées », c’est-à-dire « quasi faites, mais il faut attendre que le texte soit publié pour des raisons juridiques », ce sont les textes qui sont en consultation notamment. Les autres sont « engagées », c’est-à-dire que le travail avec « les administrations, les représentants agricoles » a commencé mais prend un peu plus de temps.

La loi d’orientation sur les rails

Le projet de loi d’orientation agricole sera déposé à la fin de la semaine au Conseil d'Etat avant une présentation en conseil des ministres prévue le 20 mars 2024. Le calendier visé est un adoption du texte en juin prochain, précise le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau.

Le texte « reconnaît noir sur blanc dans la loi notre objectif de souveraineté agricole et alimentaire et place l’agriculture au rang des intérêts fondamentaux de la nation au même titre que notre sécurité ou notre défense nationale », se félicite Gabriel Attal. « Le cap n’a pas changé », « la France doit être souveraine », martèle le Premier ministre, qui a annoncé qu’un « plan spécifique pour la souveraineté de l’élevage » sera présenté au Salon de l’agriculture et concernera toutes les filières, « bovine, ovine, caprine, porcine, volaille, et apicole ».

Gabriel Attal, premier ministre lors d'un point presse à Matinon le 21 février 2024 (© Alexis Marcotte / GFA)

Une nouveauté, le texte inscrira, pour favoriser l'installation d'agriculteurs, le principe du droit à l’essai dans la loi, annonce Marc Fesneau. Par leur nature budgétaire, les mesures fiscales annoncées pour accompagner le renouvellement des générations (rehaussement des seuils d’exonérations lorsqu’il y a transmission pour une installation, et un éventuel crédit d’impôt) seront, quant à elles, inscrites dans le projet de loi de finances pour 2025.

Le chantier retraite en construction jusqu’à l’automne

Sur la réforme du mode de calcul des retraites, Gabriel Attal indique que l’objectif est que le nouveau mécanisme de calcul soit mis en œuvre dans « les textes financiers de l’automne ». « Le travail continue avec un objectif : construire un système qui ne pénalise pas certains agriculteurs au profit d’autres évidemment, que ce soit un progrès pour les plus fragiles à travers ce nouveau mode de calcul », assure-t-il.

Nouvelle loi Egalim

Sur les négociations commerciales, le Premier ministre annonce que sur le fondement de la mission parlementaire qui a été lancée et « confiée aux députés Alexis Isard et Anne-Laure Babeau » un nouveau projet de loi pour renforcer Egalim sera présenté avec trois enjeux : la construction du prix en marche avant, et en partant d’abord du contrat entre l’agriculteur et son premier acheteur, le renforcement de la place des indicateurs de coût de production qui doivent « être plus centraux dans la construction du prix » et les centrales d’achat européennes.

Au niveau européen, un chantier a été ouvert pour mettre en place un Egalim qui « doit permettre notamment de lutter contre les pratiques abusives et de régler la question des centrales d’achat européennes ». Bruno Le Maire a également dressé un bilan des contrôles déjà effectués.

Une convention OFB-chambres d’agriculture sur les contrôles

Christophe Béchu, le ministre de la Transition écologique, a annoncé la signature prochaine — peut-être durant le Salon de l’agriculture — d’une convention entre les chambres d’agriculture avec l’Office français de la biodiversité (OFB), pour « mieux organiser » les relations. Elle est calquée sur le modèle de la convention signée avec la gendarmerie, explique le ministre.

Il précise que des « volets de pédagogie » sur les procédures de contrôles pourront être construits pour « permettre de mieux rendre compte de leur action [les agents de l’OFB] partout sur le territoire ». Le ministre veut « remettre les choses calmement à plat pour que chacun mesure quelle est sa place et quel est son rôle ». La question du port d'armes des agents de l'OFB anime particulièrement les débats.

Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, a pris la parole au pupitre de Matignon le 21 février 2024. (© Alexis Marcotte / GFA)

« Une administration, un ministère, un ministre doit balayer devant sa porte et se demander, quand on a une situation de tension, s'il y a des choses qu’il faut être capable d’améliorer. C’est ce que nous faisons, ça ne veut pas dire jeter l’opprobre ni sur une profession ni sur des fonctionnaires, ça veut dire s’interroger sur la manière dont on peut améliorer le service que nous rendons », explique Christophe Béchu.

Bio un nouveau guichet ouvre bientôt

Sur la question de l’Agriculture biologique, Gabriel Attal avait annoncé une nouvelle enveloppe de 50 millions d’euros. Il fait savoir que le guichet de demande sera ouvert « bientôt » et que les conditions d’accès ont été fixées.

Aides MHE et GNR

Sur un peu plus de 3 700 éleveurs concernés par la maladie hémorragique épizootique (MHE), 600 ont déjà déposé leur demande d’aide. Le guichet pour le fonds d’urgence pour les trésoreries de 50 millions d’euros est ouvert jusqu’au 5 mars 2024 et celui pour les indemnisations sur les frais vétérinaires et la mortalité jusqu’au 30 avril 2024.

Sur le remboursement de la TICPE sur le gazole non routier (GNR), plus de 13 000 demandes ont déjà été déposées et 1 200 déjà payées. Gabriel Attal confirme qu’à partir de juillet, la TICPE sera déduite « en pied de facture » et que les agriculteurs n’auront plus à avancer cette taxe et ensuite demander son remboursement.

TO-DE et métier en tension

Pour les employeurs, pour « faire face aux tensions de recrutement » dans le secteur, l’augmentation du seuil d’exonération sur la TO-DE, de 1,2 à 1,25 Smic, sera effective sur 2024 annonce Gabriel Attal et le secteur agricole sera reconnu comme secteur en tension. L’arrêté sera publié pendant le Salon de l’agriculture, assure le Premier ministre.

Indicateur phyto européen

Gabriel Attal confirme que le plan Ecophyto 2030 devrait être publié durant le Salon de l’agriculture et il annonce que « l’indicateur de référence pour suivre notre objectif de réduction des produits phytosanitaires ne sera plus le Nodu, indicateur « franco-français » mais bien l’indicateur européen. C’est conforme à notre volonté d’éviter toute surtransposition », déclare-t-il.

Sur le zonage, un « portail » qui simplifie la lisibilité est en train d’être créé et il n’y aura pas de registre numérique centralisé obligatoire.

Point d’étape sur la simplification

Sur la simplification, à date, 63 arrêtés ont été abrogés ou simplifiés par les préfets et 2 573 propositions ont été remontées au niveau national. Le ministre de l'Agriculture a annoncé qu'il réunissait dans l'après-midi « l'ensemble des acteurs » sur la simplificiation.

Marc Fesneau, ministre de l'Agriculture, a annoncé tenir une réunion sur le sujet de la simplification avec l'ensemble des acteurs concernés le 21 février. (© Alexis Marcotte / GFA)

Sur les dix mesures de simplification déjà annoncées, trois textes ont été publiés, trois textes seront publiés prochainement (ils sont examinés en Conseil d’État) sur le débroussaillement, les procédures de contentieux et les seuils d’évaluation environnementale, notamment pour les bâtiments d’élevage. La question de la simplification de la réglementation sur les haies sera traitée dans le projet de loi d’orientation. Le premier ministre annonce également que la procédure de demande d’indemnisation sur les dégâts de gibiers va être simplifiée.

Au niveau européen, un paquet de simplifications massives « qu’il sera possible de mettre en œuvre très rapidement » est en négociation. La France a porté 41 demandes auprès de la Commission européenne, notamment sur la gestion des risques, la simplification des contrôles et l’application facilitée des dérogations pour les cas de forces majeures et la réglementation sur les prairies permanentes (ratio prairie BCAE 1).

«Je le dis avec la plus grande force et avec la plus grande sincérité, nous avançons vite, nous allons continuer à avancer vite et continuer à avancer aussi vite que possible, on accélère, on réduit les délais, on simplifie les procédures, on verse de l’argent plus rapidement », assure Gabriel Attal.