Les cours des céréales françaises ont affiché une certaine fermeté cette semaine. Le blé augmente même sous l’impulsion de l’Inde qui pourrait avoir besoin d’importer. Le tourteau de soja se renchérit également, stimulé par les conditions sèches en Amérique du Sud et la demande en maïs américain.
Blé : rebond des prix
Pour la plupart des origines exportatrices, les prix mondiaux du blé ont progressé sous l’influence de la flambée des cours en Inde. Cette hausse laisse suggérer que le gouvernement indien pourrait avoir besoin d’importer plusieurs millions de tonnes de blé dans le but de calmer l’inflation galopante dans le pays. Ces rumeurs avaient déjà largement circulé cet été, mais les autorités indiennes avaient décidé d’interdire les exportations de blé, plutôt que d’avoir recours aux importations.
Même si rien n’a été acté, les prix mondiaux ont réagi à la hausse. Le blé français Fob Rouen a gagné cette semaine 7 $/t, à 256 $/t. Le blé US SRW s’est également renchéri de 7 $/t, à 254 $/t, tandis que le HRW n’a pas bougé. Le blé SRW, tout comme le blé meunier français, a été soutenu ces derniers jours par les ventes à la Chine des semaines précédentes.
En revanche, les prix russes ont cédé 5 $/t cette semaine, pour s’établir à 222,5 $/t Fob. Les exportations russes tendent à ralentir ces derniers jours en raison d’une demande morose, alors même que l’Égypte aurait acheté près de 1 million de tonnes de blé la semaine dernière en provenance de la mer Noire (en majeure partie originaire de Russie). À l’exception de la Chine et de l’Égypte, les importateurs ont été plutôt calmes.
Sur juillet et août 2023, les exportations françaises ont chuté de 47 % par rapport à la même période l’an dernier. Certes, la campagne passée avait été particulièrement dynamique sur sa première moitié, mais cette année, les flux sont tout de même très bas. Le blé français souffre d’une mauvaise compétitivité, tant sur l’Union européenne que sur l’Afrique du Nord, les blés de la mer Noire étant nettement décotés en Russie, comme en Roumanie et en Bulgarie.
Néanmoins, la semaine a été marquée par le chargement de deux bateaux de 30 000 tonnes dans les ports français, vers des destinations plutôt exotiques pour la France : les États-Unis et le Mexique. Ces flux ne devraient pas se poursuivre et représentent plutôt des achats d’opportunité effectués lorsque le blé américain était particulièrement cher (avant la parution du rapport World Agricultural Supply and Demand Estimates (Wasde) du département de l’Agriculture des États-Unis (USDA) de septembre).
Orge : stabilité des prix français
Cette semaine, le prix de l’orge fourragère française rendu Rouen est resté stable à 213 €/t (base : juillet). En dollars, l’orge Fob Rouen est inchangée à 231,5 $/t. Au cours de la semaine, plusieurs facteurs baissiers et haussiers se sont compensés entre eux. D’une part, les prix de l’orge ont été tirés vers le bas à cause d’une demande mondiale moindre qui se tourne progressivement vers le maïs.
D’autre part, la compétitivité croissante des orges ukrainiennes, avec un prix CPT Reni de 137,50 $/t (en baisse de 5 $/t), est également venue peser sur les cours. Les disponibilités sont significatives en Ukraine, conséquence des faibles exportations depuis le début de la campagne.
D’autre facteurs sont venus plutôt tirer les prix vers le haut. Ainsi, les exportations françaises vers la Chine sont restées dynamiques en ce mois d’octobre, avec 270 000 tonnes exportées, ou en cours d’expédition, depuis le 1er octobre.
L’augmentation du prix des orges russes a aussi soutenu les cours français. Le prix Fob Novorossiysk progresse de 5 $/t et s’affiche à 172,50 $/t. Cette hausse pourrait résulter d’une rétention des agriculteurs russes qui ne souhaitent pas vendre leur orge à des prix aussi bas, avec pour conséquence une forte contraction des exportations russes sur le mois d’octobre. Enfin, les prix du blé français ont augmenté, ne manquant pas d’induire une certaine fermeté pour l’orge.
En Ukraine, après la mise en place progressive du nouveau corridor depuis le port d’Odessa, le prix du fret maritime dans cette région a baissé. La Chine aurait acheté de l’orge ukrainienne cette semaine. Il s’agirait de son premier achat depuis le mois de mai dernier. Ce retour des orges ukrainiennes sur le marché devrait concurrencer les autres origines.
Dans le secteur brassicole, le pris de l’orge d’hiver Fob Creil diminue de 3 €/t en une semaine, à 225 €/t. En revanche, celui de l’orge brassicole de printemps Fob Creil augmente de 1 €/t, à 285 €/t. Les primes restent toujours très élevées.
Les cours du colza évoluent en ordre dispersé
Pendant la semaine, les prix du colza sur Euronext ont reculé de 8 €/t pour le contrat de novembre 2023. Cette échéance a connu une baisse du fait de la faible liquidité qui commence à se faire sentir sur ce contrat qui devra se clôturer le 31 octobre. La chute des prix du canola, ainsi que le début de la récolte du canola en Australie ont également pesé sur les cours du colza, sur le rapproché. Les prix du canola à Winnipeg ont fortement chuté à l’approche de la fin des moissons.
La production canadienne de canola a par ailleurs été revue à la hausse, particulièrement dans la province du Saskatchewan où les rendements sont finalement meilleurs que prévu. Les prix canadiens étaient également sous la pression des ventes techniques. Sur les contrats les plus éloignés,les cours du colza ont plutôt évolué à la hausse. Sur Euronext, ils ont gagné 8 €/t sur l’échéance de février et 11 €/t pour celle de mai 2024.
Le prix physique du colza Fob Moselle a suivi ce mouvement de hausse (+12 €/t, à 450 €/t), tandis que le colza rendu Rouen a baissé de 9 €/t, à 422 €/t. La hausse des prix du soja et du pétrole a apporté du soutien aux cours du colza sur les échéances éloignées. Toujours portés par la tension au Moyen-Orient, les prix de l’or noir ont rebondi de nouveau sur la semaine. À cela s’ajoute la baisse des stocks de pétrole brut aux États-Unis, en raison d’une demande soutenue à l’exportation, ainsi que sur le marché intérieur américain.
Forte hausse des prix du tourteau de soja
Sur la semaine, les cours du tourteau de soja ont connu une forte hausse. À la Bourse de Chicago, le prix de la protéine de soja a augmenté de 33 $/t sur le contrat de décembre 2023 et de 46 $/t sur celui de février 2024. Les principaux facteurs à l’origine de cette hausse des prix sont la forte demande de soja américain à l’exportation et sur le marché intérieur, ainsi que les conditions météorologiques défavorables en Amérique du Sud, qui retardent les semis.
Les cours du tourteau de soja et de la fève étaient à la hausse, à la suite de la publication des chiffres de trituration américaine de la National Oilseed Processors Association (NOPA). Sur le mois de septembre, la trituration a été très dynamique, atteignant un niveau record pour ce mois.
Par ailleurs, les ventes hebdomadaires de soja et de tourteaux de soja américain se sont avérées au-dessus des attentes du marché (à 1,4 million de tonnes et à 435 000 tonnes respectivement).
En parallèle, les conditions sèches au Brésil ralentissent les semis de soja. Selon AgRural (cabinet de conseil agro-industriel brésilien), 17 % des surfaces de soja ont été semées la semaine passée, contre 24 % l’an dernier à la même période. Le manque de précipitations et les températures élevées rendent toujours les semis difficiles, principalement au Mato Grosso, principal État producteur de soja du Brésil.
Du côté de son voisin argentin, la situation n’est pas meilleure avec un temps sec et chaud qui persiste. Toutefois, la bonne avancée des récoltes de soja aux États-Unis a tempéré légèrement la hausse des cours. La moisson y a progressé de 17 points au cours de la semaine écoulée, à 60 % contre 62 % l’année dernière.
Des conditions météorologiques favorables sont annoncées dans les prochains jours, ce qui devrait permettre une bonne avancée des coupes de soja. La tendance a été aussi haussière sur le marché français. Le prix du tourteau de soja à Montoir a progressé de 43 €/t, à 523 €/t. À ce niveau de prix, le tourteau de soja perd fortement en intérêt dans les rations animales au profit du blé fourrager.
À suivre : récoltes de maïs et de soja aux États-Unis, conditions de culture en Australie et en Argentine (céréales, colza), semis de soja et de maïs en Amérique du Sud, exportations de l’Ukraine et de la Russie, prix du pétrole, conjoncture économique mondiale.