Lors de la dernière campagne, les insectes d’automne ont été une nouvelle fois très présents sur colza, avec des dégâts parfois conséquents. Les méthodes de lutte classique basées sur le piégeage, l’observation et les traitements insecticides ne suffisent plus. « C’est la raison pour laquelle, il importe de miser sur la qualité d’implantation du colza, en cherchant à obtenir des plantes robustes à croissance automnale dynamique et régulière », déclare Gilles Sauzet, ingénieur Terres Inovia au Subdray (Cher).
Tout doit être mis en œuvre pour obtenir une levée rapide avec une bonne structure de peuplement et un enracinement puissant. « La future performance du colza se joue dès l’interculture, poursuit Gilles Sauzet. Il convient de garder en tête le calendrier d’arrivée des insectes, qui conditionne les différentes étapes des travaux en amont. Par exemple, dans l’Est, les grosses altises arrivent vers le 15 septembre, le 20 dans le Centre. L’idéal serait que le colza soit à quatre feuilles, stade à partir duquel il peut supporter les prélèvements foliaires des adultes. Dans les argiles et les argilo-calcaires, cela implique une levée au 1er septembre, et donc des semis terminés au 25 août. Dans des milieux plus faciles pour le colza, de type limon argileux ou limon sableux, la date de semis sera reculée jusqu’à début septembre. »
Obtenir une levée rapide, c’est aussi profiter de séquences climatiques favorables. Quand on regarde la fréquence des pluies dans différentes régions, il apparaît, par exemple, que le dernier travail profond devrait être réalisé au plus tard le 5 août à Châteauroux et le 10 août à Niort, pour bénéficier plus tard du stockage de l’eau sous le lit de semences.
Conserver l’humidité
La réussite de la levée puis de la croissance du colza est conditionnée par le travail du sol ou non durant l’interculture, et la gestion des résidus de récolte. Un test simple avec une bêche permet de juger du niveau de tassement et de l’état général de la structure. Le résultat détermine en partie le type d’intervention ou son absence, un travail superficiel ou profond. « Après les pluies de juin dernier et le passage des engins de récolte, les premiers centimètres sont parfois très tassés, constate Gilles Sauzet. Dans l’hypothèse d’un semis direct, la pression des disques devra être réglée en conséquence. »
En terrain argileux avec travail du sol, un décompactage des cinq premiers centimètres suffit le plus souvent. Deux passages d’un outil à disques ou à dents avec rappuyage systématique après coup affinent le lit de semences tout en conservant l’humidité sous-jacente. « Le danger d’assécher le profil est plus grand dans le cas du labour suivi de la herse rotative, prévient Gilles Sauzet. La porosité est importante dans les quinze ou vingt premiers centimètres, puis se réduit brutalement. Ces situations exposent le colza à une croissance irrégulière, qui devient alors plus sensible aux attaques de charançon du bourgeon terminal et de larves d’altises présents entre le 15 octobre et le 10 novembre. »
Utiliser tous les leviers
Quel que soit le travail du sol, les résidus de récolte sont impérativement répartis de la façon la plus homogène possible dans le profil en évitant les amas. Trop concentrée dans le lit de semence, la paille nuit au contact sol-graine et absorbe l’eau et l’azote en lieu et place du colza. En semis direct, la qualité de broyage de la moissonneuse est encore plus essentielle, ce qui n’exclut pas un passage de herse peigne destiné à briser les brins et à en améliorer la répartition.
Favoriser une croissance dynamique durant tout l’automne, avec des biomasses comprises entre 1 et 1,5 kg/m2 au 15 novembre qui réduit la nuisibilité des insectes, suppose de ne se priver d’aucun levier, y compris celui de l’azote. Parmi les différents moyens d’y parvenir, les apports organiques et l’association du colza avec des légumineuses figurent en bonne place.
« Dans les parcelles où cela n’est pas possible et quand la législation le permet, notamment en zone vulnérable, partout où l’azote peut être limitant, un apport de 30 unités avant le 31 août sur pailles du précédent enfouies couplé à du phosphore est un véritable atout. La protection insecticide arrive en dernier, comme simple complément de l’agronomie », conclut Gilles Sauzet.