Comme partout en France, la ferveur du rugby s’empare de Bordeaux où une fan-zone prend place sur le parc des sports Saint-Michel, du 8 septembre au 28 octobre 2023. Mais ce village qui attend 10 000 supporters français et étrangers sera également le rendez-vous de l’agriculture. Entre les divers stands de la fan-zone, Johanna et Pablo Gollart Melia, éleveurs de chèvres à Coulx, dans le Lot-et-Garonne, proposeront leurs fromages et glaces au lait de chèvre durant les deux mois d’ouverture du marché. « Cela représente quasi tous les week-ends et quelques jeudis », explique Johanna.
« On est des privilégiés »
Les deux éleveurs font partie des quelques producteurs choisis pour participer au marché des terroirs, un espace qui a pour but de mettre en valeur le savoir-faire des agriculteurs, producteurs locaux et artisans. « On est des privilégiés puisqu’on a deux emplacements : un stand glacier et un stand fromager », souligne l’agricultrice. « Les supporters vont faire une très belle découverte », assure-t-elle en chœur avec Pablo.

Johanna et Pablo ont repris en octobre 2014 la fromagerie Cabicoulx où Pablo travaillait en tant que salarié agricole. Huit ans plus tard, la mécanique de cette exploitation familiale est bien huilée. Si Pablo gère le poste élevage et le laboratoire de transformation fromage, Johanna s’occupe, elle, de l’atelier glace et de la communication.
Avec l’aide d’un ouvrier en élevage, du petit frère de Johanna qui est apprenti et de saisonniers, ils s’occupent de la centaine de chèvres de l’exploitation pour produire leurs glaces et fromages de chèvres. Ils peuvent également compter sur leur fille Ariana pour leur prêter main-forte. À seulement huit ans, elle est une véritable experte en câlinothérapie des chevreaux et est devenue testeuse de glaces en chef.

Glaces, fromages, crêpes et même acras au lait de chèvre sont vendus toute l’année dans la Région Nouvelle-Aquitaine à des distributeurs, magasins de producteurs, rayons de coupe ainsi qu’en vente directe sur les marchés d’été et lors d’évènements festifs. Pour ces producteurs, l’important est de valoriser leurs produits sur des manifestations labellisées par la Région ou par « Bienvenue à la ferme ».
Fort de son petit succès, les éleveurs ont décidé de valoriser leur glace au lait de chèvre sur la fan-zone de la Coupe du monde de rugby. « On est beaucoup présent en tant que glacier car des glaces au lait de chèvre, il y en a très peu en France, reprend Johanna. Pendant la coupe du monde, on va avoir une vitrine avec une quinzaine de parfums qui vont tourner. » Si les basiques à la vanille, au chocolat ou à la framboise seront présents en permanence, Johanna et Pablo proposeront d’autres parfums plus inattendus tels que pop-corn, citron meringué, noisette, cacahuète ou violette. « Même les personnes qui viendront tous les week-ends ne retrouveront pas forcément les mêmes parfums. »

Un défi à relever
Démarché par l’Agence de l’alimentation de la Nouvelle-Aquitaine, le couple n’a pas mis longtemps à accepter le challenge du marché des terroirs. « Une nouvelle aventure, c’est toujours sympathique. On est un peu téméraire, donc on a rapidement accepté », avoue Johanna. Leur motivation ? Être capable de relever le défi proposé en menant de front à la fois la ferme et la prestation clientèle pendant les deux mois de la coupe du monde.
S’ils sont fiers de participer à un tel évènement, Johanna et Pablo veulent être à la hauteur. « On veut montrer qu’un agriculteur peut élever, produire et transformer avec ces petits moyens et être aussi bon que d’autres entreprises qui sont spécialisées dans ce type d’évènements. » Ce marché des terroirs est également le moyen de partager une expérience humaine inédite en créant des liens avec les autres producteurs présents.
« En dehors du côté commercial, c’est exceptionnel de se dire qu’on va suivre cet évènement sportif au plus près », bien éloigné du petit match de village. Malgré la pression grandissante, toute la ferme attend avec impatience le début des festivités. « Mes saisonniers sont au taquet, ils veulent tous venir », se réjouit Johanna. Si elle a pratiqué un peu le rugby à l’école, c’est essentiellement Pablo qui a la passion du ballon ovale. Il a d’ailleurs pratiqué en club quand il était plus jeune. Pour cette petite ferme familiale, « c’est une magnifique opportunité. Tout le monde s’y prépare et attend la fin de la saison d’été pour être prêt en septembre. » Dans le Sud-Ouest, terre de rugby, cette fan-zone est l’occasion de voir les choses de l’intérieur, surtout pour des aficionados.
Une source supplémentaire de revenu
Du côté de l'organisation du village, rien n’est laissé au hasard. « On se sent encadré jusqu’au bout des ongles. On a plus qu’à être bon sur les produits qu’on propose sans se prendre la charge mentale de la logistique », précise Johanna. Avec les 10 000 supporters attendus, cet évènement est une source de revenu supplémentaire pour l’exploitation. « La saison est en demi-teinte, les Français ont des petits moyens et on a besoin d’événements sportifs comme celui-ci pour délier les bourses et les cœurs. »
Le couple d’éleveurs salue le choix de mettre en lumière des producteurs locaux à la place des produits des grossistes ou de la grande distribution. « En septembre, je suis sûre qu’on va avoir un petit été indien intéressant contrairement à juillet-août. » Une météo estivale qui sera propice à la dégustation de glace. « Après avoir sauté partout, les supporters auront forcément chaud. Ils auront bien besoin d’une bonne glace. »