«Nous avons commencé à vendre de la viande en direct en 2001. Cette idée germait depuis longtemps. La crise de l’ESB a accéléré sa mise en œuvre, expliquent Bernard et Sylvie Laforest, installés dans un premier temps en 1985 à Montbrison, puis en 1997 sur une exploitation plus importante à Nervieux (Loire). Le couple y élève 45 vaches salers et ferrandaises, dont les femelles sont gardées pour augmenter le troupeau et les mâles vendus en broutards en Italie. Sylvie est exploitante à temps plein, Bernard est pluriactif avec une activité de négociant en bestiaux.
« Nous sommes fiers de notre métier. Nous voulions que les consommateurs profitent de la qualité de nos produits, souligne le couple. Nous avons commencé par engraisser les mâles en jeunes bovins de 16 à 18 mois ou en veaux rosés élevés sous leur mère. Nous vendions en moyenne huit jeunes bovins, huit veaux et une quinzaine d’agneaux issus d’un troupeau de brebis noires du Velay. Les animaux étaient découpés en prestation dans un atelier de transformation privé et la viande vendue dans un petit magasin agencé sur notre exploitation. Les ventes ont progressé, le contact avec la clientèle s’est révélé intéressant et gratifiant. »
Lorsque leur fils Matthieu s’installe à son tour en 2012, les éleveurs construisent un atelier de transformation équipé de frigos, d’une salle de découpe, d’une salle de cuisson et d’un séchoir. Un boucher, Jean-Louis Poyet, est embauché à hauteur de 0,11 UTH. « Nous proposons aujourd’hui un éventail varié de viandes de bœuf, de veau, d’agneau, de volailles et de porcs avec une gamme nouvelle de produits transformés de charcuterie, explique Matthieu. La qualité est au rendez-vous avec des animaux de races rustiques et élevés avec de l’herbe et des céréales produites sur l’exploitation. » Les éleveurs ont choisi les races qu’ils aiment : la ferrandaise, dont ils sont ardents défenseurs, et la salers en bovins, des brebis noires du Velay et des porcs gascons. « Ces races de montagne sont très belles et dotées de grandes qualités d’élevage ! De plus, en n’étant dans aucun berceau de race, nous valorisons mieux notre production en direct que sur des circuits classiques. »
Deux à trois ventespar mois
Les jours de vente sont programmés avec les dates d’abattage et annoncés sur le site internet de l’exploitation. Les éleveurs envoient aussi des mailings aux communes voisines. Les clients passent commande par téléphone et viennent chercher leur viande au magasin de la ferme ouvert de 10 à 16 h les jours de vente. Toujours des samedis pour que les gens soient plus libres. « La vitrine se vide en quelques heures. Ces jours-là, nous sommes mobilisés au magasin tous les trois, précise Bernard. Nous proposons à chaque vente de l’agneau et du porc, avec du veau ou du bœuf en alternance. Les volailles le sont une fois sur deux. Nous constatons une progression des ventes au détail plutôt qu’en caissettes de dix kilos. Les clients préfèrent venir plus souvent et varier leurs achats. » L’ambiance est conviviale avec un point de dégustation et un apéritif offert.
« Matthieu n’aurait pas pu s’installer sans l’activité de vente directe , souligne Sylvie. Un agrandissement foncier était impossible et l’économie de notre système n’aurait pas permis de générer un revenu supplémentaire. » Matthieu est aussi impliqué que ses parents dans la relation de confiance créée avec les clients. « Nous prenons le temps d’expliquer et de conseiller. Les questions portent sur l’alimentation, le mode d’élevage, le lien avec nos animaux, les caractéristiques des races ou la relation entre une race et le goût de la viande. » La ferme est placée sur un axe autoroutier fréquenté avec des villes alentour. « Nous constatons un rajeunissement de notre clientèle avec des couples de trentenaires et enfants. Un jeune garçon a dit récemment à ses parents que « si ce n’était pas de la viande de chez Laforest, il n’en mangeait pas ! » Cette remarque donne de l’espoir sur les consommateurs de demain. Nous l’avons pris comme un beau compliment. C’est le privilège de l’authenticité de notre travail. »