Depuis cinq ans, le gluten n’a pas bonne presse. Ce vocable désigne un ensemble de protéines (gliadines et gluténines), naturellement présentes dans le grain de certaines céréales, qui s’organisent en réseau lors de l’hydratation d’une farine. Le gluten est présent dans le blé, le seigle, l’orge, l’épeautre et petit épeautre. La vogue du gluten free s’est popularisée et ne cesse d’attirer de nouveaux adeptes, au-delà des seuls malades cœliaques (lire l’encadré).
Ce phénomène est fortement relayé par la presse généraliste et « starisé » avec des personnalités comme Novak Djokovic, Lady Gaga ou Manuel Valls, qui ont banni de leur assiette les aliments qui contiennent du gluten. Une enquête récente du Cifap (1) auprès de 1 000 individus et de 250 professionnels de santé montre que 5 % des consommateurs ont adopté ce régime et que 25 % l’envisagent. Valérie Mousquès-Cami, du Cifap, estime que « la tendance gluten free a un impact sur l’érosion de la consommation du pain », et que les filières céréalières ne doivent pas nier le phénomène.
Marché en croissance
Même s’il reste un marché de niche, le sans gluten est en hausse de 20 à 25 % par an. Il a représenté 75 millions d’euros en valeur en 2015, et on s’attend à 150 millions dès 2020. Bruno Pierre, qui a créé il y a vingt-cinq ans ABCD Nutrition, la première entreprise de produits sans gluten en France, affirme « avoir senti une cassure il y a quatre à cinq ans, quand le marché a explosé ». La filière du sorgho, céréale ne contenant pas de gluten, s’est également emparée de la tendance en lançant des farines et des bières bio.
En dehors de l’effet de mode, la population dite hypersensible augmente, comme le constate Bernard Guy-Grand, conseiller auprès du Fonds français pour l’alimentation et la santé (lire encadré). La filière céréalière s’est désormais saisie du sujet : chez Arvalis, notamment, des études sont menées pour cerner l’origine de l’hypersensibilité au gluten. L’une d’entre elles a montré que les variétés de blé actuelles présentent une quantité de protéine moindre qu’en 1955, mais de meilleure qualité panifiable. « On ne sait pas mettre en relation ces données avec l’hypersensibilité au gluten », avoue Christine Bar, directrice qualité chez Arvalis. Le raccourcissement des procédés de pétrissage, de fermentation et de cuisson a également été évoqué par Arvalis comme des possibles pistes d’explication.
Le gluten n’a pas fini de faire parler de lui et les recherches sur le sujet promettent d’être longues.
(1) Centre d’information sur les farines et le pain.