En France, environ 75 % des 17 millions d’hectares de forêts sont privés. Il est possible pour les particuliers d’investir dans l’achat de parcelles en vue de leur exploitation, ou dans des groupements gérant des forêts, de la même manière qu’un placement dans des actions. Ce sont ces mêmes groupements forestiers qui se retrouvent en première ligne alors que plus de 60000 hectares ont brûlé en France cet été.
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Un retour sur investissement de 2 à 3 %
« Autour de Landiras [lieu d’un vaste incendie en Gironde en août, NDLR], près de la moitié des parcelles incendiées appartenait à des adhérents », déplore Stéphane Vieban, directeur général de l’Alliance Forêts Bois, une coopérative forestière qui représente un million d’hectares de forêts.
Surtout, à peine « 10 % » de ces forêts touchées étaient assurées contre les incendies, qui ont consumé les revenus à attendre de l’exploitation du bois. Et quand assurance il y a, celle-ci ne couvre que rarement l’entièreté du manque à gagner ou des travaux de reboisement. De quoi grever le retour sur investissement, autour de 2 ou 3 % par an, même si des incitations fiscales existent par ailleurs.
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Les propriétaires de ces parcelles n’ont pas tout perdu pour autant. En plus des fruits de l’exploitation du bois, investir dans des forêts peut aussi rapporter grâce à la hausse du prix des terrains, indépendant de l’arbre qui y pousse.
Des prix doublés en 25 ans
Or, les prix ont doublé en 25 ans : en moyenne, un hectare valait 2180 euros en 1997 contre 4410 euros en 2021 selon l’indicateur du marché des forêts réalisé avec des données des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer). Autre signe d’une montée en puissance du secteur : le nombre de transactions a augmenté de plus de 70 % entre 2009 et 2021.
Pour les particuliers, les risques de pertes sont limités car les investissements ne se font pas sur une parcelle spécifique, mais sont mutualisés, expliquent les acteurs du secteur. « On veille à la diversité des localités, des essences d’arbres et en termes de maturité », présente Arnaud Filhol, directeur général de France Valley, qui compte 22000 hectares sur 142 forêts en France et en Europe.
Face aux multiples conséquences du changement climatique sur les forêts, avec les incendies, mais aussi les sécheresses, la question d’aller investir dans les forêts les plus à risque se pose, notamment pour les nouvelles structures.
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Des risques à limiter
« Nous ne sélectionnons pas de forêts situées au sud de l’Auvergne pour limiter le risque d’incendie […] sauf avec des critères bien particuliers », notamment si elles se trouvent en montagne et exposées à un climat humide et frais, explique Benoît Gueguen, analyste de Vatel Capital, 2000 hectares sous gestion depuis 2014.
De même, très peu d’investisseurs se risquent à aller dans l’arc méditerranéen. La nature des massifs, le temps sec et la difficulté d’installer des aménagements pour limiter le départ ou la propagation des flammes a de quoi refroidir bien des ardeurs. Cependant, les plus grosses structures, souvent issues de regroupements d’entités locales, y sont déjà installées.
« Nous avons aussi un engagement de participer au développement des territoires » et de préservation de la forêt, détaille Jean-Pierre Mesnil, directeur des investissements forestiers et fonciers à la Société Forestière. Cette filiale de la Caisse des Dépôts gère plus de 300000 hectares, dont 45000 hectares en Aquitaine.
Des coûts plus importants pour la lutte contre les feux
« On surveille toutes nos forêts. On les entretient, passe les débroussailleuses le long des routes », dit-il. Les propriétaires paient aussi des cotisations pour financer les Associations de défense contre l’incendie (DFCI). Selon Arnaud Filhol, « demain sera plus dur qu’aujourd’hui. Les coûts vont augmenter, mais cela reste corrélé au prix de vente », espère-t-il.
En 2021, le prix du bois, toutes essences confondues était de 81 euros le mètre cube, selon l’interprofession, le niveau le plus haut atteint depuis le début de l’étude, en 2001, et malgré une offre importante cette année-là. Soit un bond de 33 % par rapport à 2020.