D’une part le phosphore est un élément qui, même en quantité importante dans le sol, demeure peu disponible et d’autre part est peu mobile. « Une fois les réserves de la graine épuisées en phosphore, la plante doit rapidement en trouver dans le sol à proximité de ses racines, rappelle  l’Unifa (Union des Industries de la Fertilisation). Il peut alors devenir un facteur limitant majeur et entraîner un retard de croissance et de développement. Ainsi son apport au semis favorise la vigueur au démarrage et stimule la croissance du système racinaire qui va plus rapidement explorer les réserves en phosphore du sol. »

C’est dans ce contexte qu’Arvalis a souhaité vérifier l’intérêt de la fertilisation localisée au semis du blé, très pratiquée sur maïs notamment. « Dans nos essais, à dose de phosphore identique (souvent 40 kg/ha de P2O5), nous avons remarqué qu’indépendamment des seuils de carence, il existe un intérêt pour cette pratique », informe Grégory Véricel, ingénieur R&D en fertilisation chez Arvalis. Ainsi, les résultats montrent que lorsque la teneur en phosphore est pauvre, la réponse sur le rendement est plus marquée avec un apport localisé sur la ligne de semis comparé à un épandage en plein enfoui au semis. A noter également : même lorsque les teneurs ne sont pas limitantes, la réponse reste visible. En moyenne, le gain de rendement moyen de la localisation des apports de phosphore au semis du blé est de + 2,7 q/ha.

Analyse de sol

Pour cet élément, comme pour le potassium, il faut être dans une logique d’entretien sur le long terme pour compenser les exportations des cultures. Or la fumure de fond fait souvent les frais des hausses de coûts des autres postes (tels que l’azote, les produits phytosanitaires, le carburant…). Les exploitants décident alors de ne plus faire d’apports d’autant qu’ils n’observent pas de pertes tout de suite, en tout cas sur les cultures les moins exigeantes (blé, maïs, tournesol, soja…). Ce qui les incite à continuer et lorsque les résultats décrochent, c’est l’incompréhension.

En outre, compte tenu des prix actuels, on peut se questionner sur l’apport d’une demi-dose en localisé, par exemple. Toutefois, le spécialiste averti :« si on le fait tous les ans, la teneur va rapidement diminuer et à moyen long terme, les rendements vont plonger. »

« Nous recommandons d’employer des formes classiques (voir l'encadré) comme le super 45 qui a une très bonne solubilité. Mais des engrais binaires (N, P) ou tertiaires (N, P, K) sont également possibles et ne présentent pas de différence d’efficacité », ajoute Grégory Véricel. Il faudra toutefois dans ce dernier cas faire attention à ne pas dépasser les 10 unités d’azote réglementaires.

« Il y a certainement eu des impasses l’automne dernier et les exploitants pourraient être tentés de recommencer cette année. Toutefois, plutôt que d’acheter des engrais binaires ou tertiaires parfois par simplicité, et qui ne sont pas toujours justifiés, il vaut mieux cibler l’élément utile et cela passe par l’analyse de terre (à partir de 50 €) », estime ce dernier. Ainsi, pour vérifier dans quelle situation exacte on est, il est fortement recommandé d’en réaliser tous les 4-5 ans. Au vu des résultats sur blé avec des teneurs élevées, il est possible de faire des impasses durant 2 à 3 ans alors que dans des situations très limitantes, on apportera jusqu’à 1,6 fois les exportations.