Pour améliorer les qualités nutritionnelles et sensorielles des viandes, de nouvelles stratégies d’alimentation sont proposées aux éleveurs. Parmi les plus célèbres, la supplémentation en graines oléagineuses, qui permet de doper la présence de lipides dits « d’intérêt », comme les acides gras insaturés, dans les produits. « Au-delà de l’aspect qualitatif des viandes, nous nous sommes penchés sur l’intérêt de cette alimentation pour la santé animale, présente Deny Durand, ingénieur de recherche à l’Inra, lors des journées 3R à Paris, début décembre 2016. Car si le consommateur se préoccupe de la qualité de la viande, il a également le souci de savoir comment l’animal a été produit, et si son bien-être a été respecté. »
Dangers de l’oxydation
Les chercheurs estiment que les oméga-3 sont un atout pour la santé de l’animal, comme pour celle de l’homme. Ils auraient aussi un effet sur la qualité nutritionnelle des produits. « Mais ces fameux oméga-3 sont des acides gras poly-insaturés, qui sont donc sensibles à l’oxydation, rappelle Denys Durand. Cela ne représente-t-il pas un risque pour l’animal lui-même comme pour le produit ? On sait déjà que si ces acides gras sont oxydés, ils altèrent les fonctions hépatiques, immunitaires, de reproduction… leur impact est alors négatif. »
Les conditions d’oxydation peuvent survenir au moment de l’élevage. Le stress, notamment, est un facteur important : « Le vêlage, les chocs nutritionnels importants liés à des quantités ingérées élevées, ou à l’inverse des carences, ainsi que les chocs climatiques, les états infectieux, et tous les chocs émotionnels… », énumère Deny Durand.
Pour en avoir le cœur net, une expérimentation (1) a été menée sur 400 animaux de sept races, et sur une durée de trois ans et demi. Des prises de sang ont été faites une semaine avant l’abattage, afin de suivre trois paramètres importants : le fonctionnement du foie, le niveau d’inflammation potentiel, l’équilibre en stress oxydant. « Après l’abattage, les résultats traduisent des constantes hépatiques, d’inflammation et de détoxification, en dessous des valeurs pathologiques, assure Denys Durand. Preuve que la distribution de rations enrichies en oméga-3 ne conduit pas à une altération des constantes de santé de l’animal. » Il serait donc possible de produire des animaux de qualité, avec un bon apport en oméga-3, tout en tenant compte de la santé des animaux producteurs. « C’est un axe de communication fort pour la filière, en réponse au consommateur demandeur de toujours plus de sécurité », conclut-il.
(1) Collaboration entre l’Inra, Valorex, Terrena, l’Institut de l’élevage, Bleu-Blanc-Cœur et Foton-CNRS.