Tereos est « un groupe coopératif solide », a insisté Gérard Clay, président du conseil d’administration de Tereos en introduction de la conférence de presse annuelle du groupe sucrier, le 28 mai 2025 à Paris.

En 2024-2025, Tereos a enregistré le troisième meilleur exercice de son histoire, après deux années exceptionnelles, avec un Ebitda (1) de 801 millions d’euros. « Ces résultats positifs nous permettent d’affronter des aléas et des bas de cycle et d’afficher une rémunération de la betterave à près de 41 €/t, a indiqué Gérard Clay. Ils permettent aussi de maintenir les hectares de betteraves, de réinvestir dans les usines et de désendetter. »

Surproduction de sucre en Europe

Olivier Leducq, directeur général de Tereos, s’est félicité de la « performance solide » du groupe, « malgré un environnement de marché qui s’est progressivement dégradé ». Le portefeuille d’activités de Tereos est diversifié, parmi lesquelles le sucre représente 47 %, suivi par la production d’alcool et d’éthanol (18 %), de produits sucrants (13 %) ou encore d’amidon (5 %).

Les marchés ont été chahutés, particulièrement en Europe, poursuit-il. « Les prix européens du sucre ont baissé de 40 %. » Cela s’explique notamment par la surproduction liée à la hausse des surfaces de betteraves en Europe de 12 %. « Conformément aux recommandations du conseil d’administration de Tereos, les coopérateurs ont maintenu des surfaces stables. Nous n’avons pas voulu participer à cette croissance déraisonnable. »

Pression des importations

À cela s’est ajoutée la pression des importations, avec un afflux massif en provenance de l’Ukraine qui a amplifié cette surproduction. Un phénomène est également subi sur d’autres marchés, avec la persistance d’importations d’alcool du Pakistan et du Pérou, ou encore de l’éthanol de maïs en provenance des États-Unis à bas prix, « qui prend des parts considérables de nos marchés et les sature », considère Olivier Leducq.

Il rappelle que les prix du marché européen ne sont pas nécessairement indexés sur ceux du marché mondial. « Le marché européen répond à ses propres dynamiques », explique-t-il. En 2025-2026, les surfaces européennes devraient significativement baisser et revenir « à un niveau raisonnable », ce qui devrait avoir « un impact positif sur les marchés », juge Olivier Leducq.

Les prix mondiaux baissent de 20 %

Sur le marché mondial du sucre, des facteurs climatiques ont été défavorables à la production : au Brésil, la sécheresse et des incendies « d’une ampleur inhabituelle » (30 000 ha concernant Tereos) ont impacté la récolte. « Ces deux phénomènes négatifs n’ont pas été compensés par une meilleure production ailleurs », indique le directeur général de Tereos.

Malgré le déficit mondial de sucre, à 5,5 millions de tonnes en 2025, les prix mondiaux ont baissé de 20 % sur un an en 2024-2025. « Cela reste un prix correct par rapport à l’historique, estime Olivier Leducq. Par rapport au déficit, on aurait pu s’attendre à une hausse des prix, mais plusieurs facteurs négatifs se sont cumulés. La demande en Chine est restée faible, bien que les niveaux de stocks chinois soient au plus bas depuis 13 ans. La dévaluation du réal brésilien par rapport au dollar, et la forte position spéculative des fonds ont aussi joué un rôle important. »

Sur le marché de l’amidon et des produits sucrants, « on a comme l’année passée une demande qui reste faible et qui ne retrouve pas ses niveaux d’avant le Covid. Le niveau de surcapacité installé en Europe est assez important, entrainant une pression sur les prix de ces produits », poursuit Olivier Leducq.

En 2025-2026, il anticipe « une année compliquée ». « On s’attend à un rebond du marché du sucre, mais que l’on ne ressentira sur nos comptes que sur l’exercice encore d’après », justifie-t-il.

Des rendements décevants

En France, le rendement des betteraves a été impacté par les fortes pluies en octobre 2024, et par le développement précoce de la cercosporiose. « Cette année, les rendements en betteraves de Tereos s’élèvent à 78 t/ha, ce qui est plutôt bas comparativement aux six à sept dernières années », estime Olivier Leducq. Concernant la luzerne, après une année exceptionnelle en 2023, les conditions météo ont été difficiles en 2024 et les rendements sont inférieurs.

Comme au Brésil, la production en 2024-2025 de canne à sucre à la Réunion a été décevante en raison de sécheresse. Elle est en retrait de 20 % sur un an, et de qualité médiocre. « Le cyclone Garance a eu des effets dévastateurs au nord de l’île, rapporte le directeur général. On peut s’attendre à des rendements dramatiques. La chambre d’agriculture a évalué les dommages à 80 millions d’euros pour la filière. »

Des investissements massifs

« Tereos poursuit son plan structurel de transformation industrielle. Cette année, 353 millions d’euros ont été investis dans nos usines au service de la performance et de la productivité de nos activités », ajoute Olivier Leducq.

La décarbonation est un « axe majeur » de la stratégie de Tereos. Les investissements d’électrification des processus effectués sur les sites pilotes de Bucy (Aisne) et Attin (Pas de Calais), ont notamment permis des réductions d’émission de carbone (11 200 tonnes de CO2 pour le premier, 15 000 tonnes de CO2 pour le second). En 2025, le site de Connantre (Marne) sera par ailleurs la première usine du groupe totalement autonome en eau.

Le groupe entend par ailleurs poursuivre la cession de ses activités « non stratégiques ». Olivier Leducq cite par exemple la cession cette année de l’activité de conditionnement de sucre de bouche en Angleterre, ou encore de l’activité de négoce hors sucre à la Réunion.

Décarboner la matière première agricole

Tereos affiche un « plan ambitieux » de décarbonation sur dix ans. La matière première agricole (betterave, canne à sucre…) représente 50 % des émissions de CO2 du groupe, qui souhaite les réduire de 36 % d’ici à 2033.

« Cela passe par la mise en œuvre de pratiques d’agriculture régénératrice, indique Olivier Leducq. Tereos va financer à hauteur de 75 % les 1 000 premiers diagnostics carbone de ses coopérateurs. » Le groupe travaille dans une dynamique collective avec d’autres coopératives, dont Vivescia ou Noriap. « En fonction du programme et du résultat, une prime de filière de 50 à 150 €/ha sera versée aux coopérateurs engagés », a fait savoir le directeur général.

(1) Bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement.