Comment ces organisations, comme les Soulèvements de la Terre, parviennent-elles à mobiliser ?

Nous avons à faire à ce qu’Étienne Klein décrit parfaitement : l’ultracrépidarianisme. À savoir l’art de parler avec assurance de choses que l’on ne connaît pas. Parce que la conscience des enjeux environnementaux grandit, le sentiment d’urgence l’accompagne. Il en ressort un comportement grégaire à partir de messages simplistes qui font illusion auprès d’un public jeune et amateur. Des mouvements, comme les « Soulèvements de la Terre », cristallisent ces « énergies » pour en faire des combattants du front. Et des personnes passent ainsi à l’acte sans aucune hésitation, convaincues du bien-fondé de leurs actions. Le point commun entre tous ces mouvements est bien l’ignorance.

Ces militants n’ont-ils pas en commun de surtout défendre l’écologie ?

L’écologie a bon dos. Ces activistes s’autoproclament défenseurs de l’environnement, mais leurs arguments sont simplistes. Il suffit de lire ce qu’ils écrivent au sujet de l’implication des retenues collinaires dans la survenue de séismes… Il faut être capable de leur dire qu’ils racontent n’importe quoi. Aujourd’hui, la conscience des enjeux climatiques est à peu près partagée par tous.

Pour certains, elle remonte à trente, quarante… cent ans. Des actions ont été et sont engagées, mais elles paraissent le plus souvent méconnues du grand public. D’où cette scission, très inquiétante : nous faisons face à de graves risques de confrontation entre professionnels experts et ces mouvements idéologiques, incapables d’entendre le point de vue de l’autre.

Ces mouvements parviennent-ils à collaborer ?

On a assisté à leur émergence en 2016, avec « Nuit debout ». D’autres mouvements comme Extinction Rébellion ont commencé dans cette même période, à se structurer et construire leur méthodologie. Sur leur site internet comme sur celui des Soulèvements de la Terre, on peut lire la marche à suivre en cas de garde de vue et les niveaux d’action auxquels les militants peuvent prétendre, jusqu’à l’acte physique.

Tous ces mouvements s’entendent et s’accordent autour d’un ennemi commun, en particulier l’agro-industrie. Mais sur le reste, c’est plus compliqué. On l’a vu à Notre-Dame-des-Landes et à Sainte-Soline : quand il s’agit de s’organiser et d’agir, c’est le grand bazar. Ils en sont incapables, d’autant plus que chaque mouvement est convaincu de détenir la vérité.

Par quels moyens ces tensions peuvent-elles s’apaiser ?

Une dégradation progressive de l’éducation des enfants s’est installée. Ils éprouvent notamment une grande difficulté face aux contraintes et aspirent à un autre modèle. Mais ça ne tient pas. Il suffit de regarder les parcours des acteurs politiques des mouvements écologistes et de La France insoumise : aucun d’eux ne vit à partir de ce qu’ils produisent mais de ce que la puissance publique parvient à collecter. Pour sortir de cela, il va falloir mettre en avant « ceux qui font ».

Il existe beaucoup de belles initiatives à promouvoir. Il est essentiel également de repenser l’éducation de nos enfants, ainsi qu’agir pour viser les meneurs de ces mouvements. Ce qui aujourd’hui change, c’est que sur les réseaux sociaux, on assiste à un tel ras-le-bol des scientifiques que certains osent taper du poing sur la table. Un mouvement émerge. Les prises de parole d’experts, comme au Parlement autour de la souveraineté énergétique, font du bien. On n’avait pas l’habitude de les entendre.