Jusqu’à présent, l’estimation de la production laitière des vaches allaitantes reposait sur une double pesée du veau avant et après tétée, effectuée par un opérateur. Un chantier souvent long et fastidieux. À la station de Laqueuille (Puy-de-Dôme), l’unité expérimentale Herbipôle de l’Inrae a mis au point une méthode automatisée.

« Le dispositif est placé entre les cases des veaux et de leurs mères, explique Ludivine Derboule, ingénieure d’études à l’Inrae. Les veaux choisissent d’eux-mêmes d’aller téter, ce qui ne perturbe pas leur rythme naturel. » Résultat : un volume de données nettement supérieur à celui obtenu par la méthode traditionnelle. « Nous avons suivi les productions laitières de vaches charolaises et salers pendant quatre ou cinq mois, sur trois hivers », précise-t-elle.

Suivi précis des GMQ

Pour convertir ces données en estimations de production laitière, l’Inrae a mis au point un algorithme intégrant le temps passé par le veau dans l’enclos maternel. « Nous avons modélisé la décroissance naturelle du poids métabolique du veau liée à la digestion, aux excréments, etc., explique l’ingénieure. Cette perte est estimée entre 5 et 8 grammes par minute, et ajoutée au poids mesuré pour simuler une pesée juste après la tétée. » Si le veau reste plus de deux heures dans l’enclos des mères, la mesure est automatiquement écartée. Par ailleurs, les veaux ont accès à l’eau et au foin uniquement dans leur parc, ce qui permet d’isoler la consommation de lait.

« Sur 300 jours de lactation, chaque kilo de lait supplémentaire produit se traduit par un gain moyen quotidien accru de 60 à 80 grammes », souligne Ludivine Derboule. (©  Cécile Prétot/GFA)

Ce dispositif sert aussi à suivre les croissances, notamment les gains moyens quotidiens (GMQ). « Sur 300 jours de lactation, chaque kilo de lait supplémentaire produit se traduit par un gain moyen quotidien accru de 60 à 80 grammes », souligne Ludivine Derboule. Cela représente une économie de 400 à 600 grammes de concentrés par kilo de lait consommé. Des données comportementales sont également collectées, telles que le nombre et l’horaire des tétées quotidiennes.

Calculer les besoins des mères

À partir du troisième mois de collecte, une courbe de production laitière peut être modélisée grâce à un modèle développé par l’Inrae. « Cela nous permet de reconstituer la courbe de lactation d’une vache allaitante, de calculer ses besoins nutritionnels et d’adapter son plan de rationnement », indique Ludivine Derboule. Le site de Laqueuille s’oriente vers un but précis : réduire les intrants sur l’exploitation et atteindre l’autonomie alimentaire. Le schéma de sélection des animaux est adapté dans cette optique. « La production laitière des mères est un de nos critères prioritaires. »

Autre atout de ce dispositif automatisé : les veaux s’y adaptent rapidement. « Ils le traversent naturellement », observe Ludivine Derboule. Pour Marc Barbet, assistant ingénieur sur le site, c’est un avantage à long terme : « Ces animaux deviennent plus dociles à la contention, observe-t-il. Ils ne sont pas stressés, et gardent cette docilité toute leur vie. Le travail des techniciens pour la manipulation des animaux est alors facilité. »