« Il y a huit ans, quand j’étais encore en conventionnel, je tenais beaucoup à l’agriculture de conservation des sols (ACS). En passant au bio, il y a cinq ans, ça m’aurait vraiment embêté d’abandonner. » Benoît Serin, agriculteur bio dans le Gers, témoignait ainsi, il y a quelques semaines, lors d’une rencontre entre agriculteurs bio et en ACS. « La conservation des sols donne du sens à la bio, reprend-il. En bio, on est dépendant de la qualité de notre sol, de la matière organique. »

Benoît Serin a donc mis en place des couverts d’intercultures sur environ la moitié de ses surfaces. « Ça m’a permis de faire face à l’érosion, même si tout n’est pas complètement réglé, indique-t-il. Et j’ai augmenté de 0,2 ou 0,3 point le taux de matière organique dans mes sols. »

Le trèfle, un atout

Quels sont ses couverts ? « Je mets un peu de tout : de l’avoine, de la vesce, du sorgho… Le trèfle est intéressant, qu’il soit violet, blanc ou d’Alexandrie, répond-il. J’implante systématiquement des légumineuses pour aller chercher du reliquat azoté. » Si, en raison de la météo et des marchés changeants, s’appuyer pour le moment une rotation type est très compliqué, Benoît Serin en imagine une « idéale » où le trèfle aurait une bonne place.

Ainsi, il enchaînerait un an et demi de trèfle violet et trois ou quatre ans de culture (colza, tournesol, blé-féverole puis triticale en sec ; maïs, soja, blé-féverole puis soja ou tournesol en irrigué). Il apprécie également le trèfle squarrosum, fourrager, « qui fait de la biomasse très vite ». D’où une couverture rapide des sols et une efficacité accrue contre les adventices.

Pour détruire ses couverts, Benoît Serin a opté pour la fraise rotative. « C’est mon glyphosate à moi ! s’exclame-t-il. Les deux premières années en bio, je détruisais le couvert notamment avec un déchaumeur à dents, mais ça demandait plusieurs passages. » Il y a trois ans, avec un voisin, il a investi environ 17 000 euros dans une fraise rotative : « Ça scalpe et ça hache, tout est détruit en un seul passage », assure-t-il.

Benoît Serin (à droite) présente sa fraise rotative lors d'une rencontre entre agriculteurs bios et en ACS. (©  Christophe Zoïa/GFA)

La fraise est donc « un outil très efficace, mais coûteux », admet-il. En plus de l’investissement, il faut prendre en compte l’usure rapide des lames et une consommation importante de gasoil (lire l’infographique). Pour lui, cet outil représente « le juste milieu entre bio et conservation du sol ».

Autre technique de destruction : le pâturage. « Depuis deux ans, un éleveur ovin vient avec son troupeau et pâture sur 15 à 20 ha ». Voilà « un mode de destruction de couvert supplémentaire. Mais l’intérêt est surtout la restitution organique des brebis ». Et certaines adventices peuvent aussi souffrir de ce passage.

Plusieurs cartes contre les adventices

Les adventices, en effet, « peuvent être un gros problème en bio et en non-labour », en atteste l’agriculteur gersois. « À partir du moment où il y a un travail du sol, les couverts vont lever mais les adventices aussi, indique-t-il. La seule manière que j’ai trouvée de les gérer, c’est d’implanter des couverts composés de certaines espèces très agressives (type sorgho fourrager ou avoine). »

Les destructions de couvert se font à la fraise rotative. Par la suite, la gestion des adventices et repousses de couvert se fait avec des passages de vibroculteur. Pour prendre de court les adventices, « dans mes mélanges de couvert, je sème toujours des espèces capables de repartir après un broyage », explique-t-il.

Face au datura, « j’embauche une équipe qui vient l’arracher à la main sur mes cultures d’été. Cette année, en une journée à huit personnes, ils ont fait 10 ha. » Il admet toutefois : « Les deux adventices qui m’inquiètent le plus sont le ray-grass, qui avait disparu depuis ma conversion en AB mais que j’ai revu cette année, et surtout le xanthium qui commence à prendre de l’ampleur et qui est difficilement gérable mécaniquement. »