Seize associations et syndicats ont décidé d’attaquer en justice l’État « pour sa politique de sanctions à l’encontre des chômeurs et allocataires du RSA », le 23 octobre 2025. Parmi les associations, Solidarité paysans, qui aide les agriculteurs en difficulté, mais aussi les syndicats CFDT et CGT, présents dans le monde agricole. En août 2025, 30 300 allocataires bénéficiaient du RSA, dont 14 770 agriculteurs et 15 530 salariés agricoles.

La raison de leur colère ? Le décret du gouvernement du 31 mai dernier qui précise les « sanctions applicables aux demandeurs d’emploi en cas de manquement à leurs occupations ». Le décret, obligeait les bénéficiaires du RSA à faire état de 15 heures d’activité hebdomadaire. Une convention entre France travail et la MSA signée au dernier salon de l’agriculture devait permettre aux agriculteurs bénéficiaires du RSA d’en être exemptés car ils disposent déjà d’une activité.

Mais en réalité, il y a « de grandes inégalités territoriales », observe Jérôme Martinez, chargé de la communication de Solidarité paysans. Le versement du RSA est géré par les départements. Ceux ayant délégué la gestion des dossiers à la MSA, appliquent facilement cette convention d’exception, mais certains ont choisi d’autres organismes. Ce qui rend difficile l’application uniforme de la convention signée uniquement entre la MSA et France Travail.

Flou sur les modalités de sanction

Même sans les 15 heures d’activité obligatoire, les agriculteurs doivent assister à divers rendez-vous ou « occupations » pour bénéficier du RSA. Depuis le décret, si l’agriculteur ne s’y présente pas, il risque de perdre tout ou une partie de l’allocation. « Il y a un très grand flou sur les critères d’application des sanctions. Dans certains endroits il y a un risque de suppression à 100 % du RSA [en cas de manquement aux rendez-vous, parfois même un seul] d’autres endroits c’est 30 % du RSA… »

Or, les rendez-vous ne sont pas forcément adaptés au secteur agricole, indique Jérôme Martinez : « Le coaching est délégué à des dispositifs privés dans pas mal d’endroits ». Des organismes qui brillent par leur méconnaissance du secteur agricole, constate le salarié de Solidarité paysans. « Nous avons des témoignages dans certains départements, de coaching à côté de la plaque ». Un exemple : la nécessité pour un agriculteur bénéficiaire de « justifier d’un développement de son chiffre d’affaires » pour bénéficier du RSA. Difficile quand un mauvais temps, une inondation ou une maladie est responsable d’une mauvaise récolte.

« En mettant en place des sanctions sans faire comprendre aux gens les critères, cela décourage » de demander l’aide sociale, déplore-t-il. Le taux de non-recours à l’allocation dans le secteur agricole est l’un des plus élevé. En 2023, la MSA estimait qu’un agriculteur sur deux qui a le droit au RSA ne le demande pas, contre un salarié sur trois du régime général.