« En ouvrant ma porte au facteur ce 1er juillet 2013, j’étais loin d’imaginer la suite des événements. Il m’apportait une lettre recommandée en provenance de l’Espagne. Même si je ne comprends pas cette langue, j’ai tout de suite compris que c’était grave. On me convoquait devant le tribunal pour un vol de carburant que j’aurais commis le 9 novembre 2012 à Irun, dans le pays Basque. N’ayant jamais mis un pied sur le sol espagnol, je pensais que cette histoire allait vite s’éclaircir. Sur les conseils du maire de ma commune, j’ai contacté le consulat d’Espagne, et celui de France. Tous deux m’ont recommandé de prendre un avocat. Compte tenu des prix pratiqués, je ne l’ai pas fait. Entre-temps, les gendarmes de mon secteur m’ont indiqué que d’après leurs investigations, le véhicule incriminé était une Peugeot 407, dont l’immatriculation correspondait à celle de mon tracteur ! Ce fut un soulagement. Avec l’attestation de mon maire stipulant ma présence dans la commune le jour du délit, toutes les preuves étaient réunies pour me disculper.
Coup de théâtre
Le 12 novembre 2013, je reçois par courrier le résultat du jugement. J’étais sans voix. Malgré tous les éléments apportés, le tribunal d’Irun me condamnait à 232 euros d’amende. Je n’ai pas donné suite. J’étais innocent et je l’avais prouvé. Quelques mois plus tard, nouvelle lettre de l’Espagne m’ordonnant de payer, sous peine de quinze jours de prison ! Je me suis senti anéanti. Comment allais-je pouvoir me sortir de cette histoire ? Cette question me hantait nuit et jour. J’ai vécu un véritable calvaire psychologique.
Ne pouvant me payer un avocat, j’ai essayé de me défendre par mes propres moyens en portant plainte pour usurpation de plaques d’immatriculation, en contactant le défenseur des droits et en alertant la presse. Durant tout l’été 2014, les médias locaux et nationaux se sont succédé sur mon exploitation. Trois semaines après le passage de TF1, j’ai enfin vu le bout du tunnel. Par voie postale, le procureur de la République m’annonçait que les autorités judiciaires d’Irun avaient décidé de ne pas mettre à exécution la peine d’amende prononcée à mon encontre. J’étais enfin innocenté. Fini les angoisses. J’ai retrouvé une vie normale, même si j’avoue encore appréhender l’heure de midi, celle où le facteur vient frapper à ma porte. »
Propos recueillis par C. Penet