Cette décision de justice fera date. Dans un arrêt daté du 17 mars 2020, la cour d’appel de Rennes condamne l’association abolitionniste DxEpour s’être introduite, sans autorisation, dans un élevage porcin des Côtes-d’Armor, avec le député Bastien Lachaud (LFI). Débouté dans un premier temps, l’éleveur des Côtes-d’Armor, qui avait porté plainte, a eu gain de cause.
« J’ai l’impression que le droit a enfin prévalu. Et que nous sommes passés de l’émotionnel à une approche beaucoup plus juridique », a indiqué à La France agricole Jean-Pierre Depasse, l’avocat de l’éleveur.
Motif 1 : la violation du droit de propriété
Le trouble manifestement illicite, lié à la violation du droit de propriété et à la violation du domicile, a finalement été reconnu. « Ce droit fondamental avait bien été bafoué. Et cela est très important : la cour d’appel dit que rien ne peut justifier cette violation de propriété, parce qu’aujourd’hui locaux professionnels ou locaux privés bénéficient bien de la même protection », a expliqué Jean-Pierre Depasse.
Motif 2 : le non-respect des règles sanitaires
La cour d’appel motive par ailleurs sa décision par le non-respect des règles sanitaires. « C’était un élément que l’on avait également invoqué auprès du tribunal de Saint-Brieuc, mais qui n’avait pas été retenu. C’est désormais chose faite : en agissant ainsi, cette association a mis en péril la sécurité sanitaire de l’exploitation. »
Personne ne peut en conséquence « s’autoproclamer contrôleur des élevages ou se substituer aux autorités de contrôle, qui sont, quant à elles, agréés, assermentées et soumises à une réglementation stricte ».
L’association anti-élevage condamnée
La cour d’appel de Rennes ordonne le retrait de la vidéo litigieuse présente sur le site internet de l’association DxE, ainsi que sur l’ensemble des réseaux sociaux et des plateformes de vidéos en ligne. Elle demande la saisie des supports, des clichés photographiques et films vidéos, pris par les membres de l’association DxE lors de leur intrusion. Elle interdit à toute personne leur utilisation et leur diffusion.
La justice condamne aussi l’association DxE à publier cette décision en haut de la première page de son site internet, ainsi que dans trois quotidiens nationaux. DxE devra par ailleurs s’acquitter de la somme symbolique de 1 euro, à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice subi par l’éleveur. « Nous ne voulions pas en faire une affaire financière, ce n’était pas l’objectif, ajoute maître Jean-Pierre Depasse. La cour a considéré qu’il y avait bien préjudice. Le chiffrage du préjudice sera précisé dans un deuxième temps. »
DxE a été condamné également à 3 000 euros au titre des frais d’avocat, somme à laquelle l’éleveur avait été condamné en première instance. L’association DxE peut encore contester cette décision et saisir la Cour de cassation.
En parallèle, une enquête sur cette même affaire, et dans laquelle le député Bastien Lachaud est cité, est toujours en cours.
D’autres affaires à suivre
« Cet arrêt est très important pour la suite alors que d’autres affaires de ce type seront prochainement jugées. Nous allons pouvoir nous appuyer sur cette décision », indique Jean-Pierre Depasse. Une procédure est en cours à la cour d’appel d’Angers : elle devrait être jugée en septembre. Deux autres affaires d’intrusion sans autorisation devraient se tenir à Saint-Malo, dont une en mai. Elles concernent des élevages de porcs, de volailles de chair et de poules pondeuses.
Rappel des faits dans l’affaire Lachaud
Une vidéo montrant le Bastien Lachaud (LFI), député de la Seine-Saint-Denis, filmé de nuit dans un élevage porcin par l’association abolitionniste DxE, était diffusée le 22 mai dernier sur les réseaux sociaux. L’éleveur des Côtes-d’Armor avait déposé plainte contre le parlementaire, avec demande de levée de son immunité parlementaire.
Il avait également porté plainte contre l’association DxE pour atteinte à la réglementation sanitaire, violation du droit de propriété, de domicile, atteinte à la vie privée et prises de vues aériennes non autorisées.
Par une ordonnance de référé du 3 octobre 2019, le tribunal de Saint-Brieuc avait rejeté l’ensemble des demandes de l’éleveur vis-à-vis de DxE. Son avocat Jean-Pierre Depasse avait fait appel de cette décision.
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